Rues d'Ilymir

- Si ça dure plus longtemps, je crois que je vais le laisser tomber dans la neige. Peut-être que ça va le réveiller tiens.

- Cesse de dire des bêtises, et ne me regarde pas moi, regarde devant!

- Oui, oui, n'empêche que...

- Attention!

Trop tard. Leur blessé avait été percuté par une inconnue qui, elle non plus, ne regardait pas où elle aurait dû.

Fynarine a écrit:

- Excusez-moi, je ne regardais pas où j’allais.

Lynn explosa.

- Evidemment! Vous étiez plus occupée à reluquer le beau jeune homme qui passait! J'en ai ma claque de cette foutue nuit! Vous avez de la chance que l'on soit pressé, sans quoi je vous aurais réduite en un tas de chairs sanguinolente!

La femme s'était penchée sur Graouill-Hi.

- Rassurez-vous, il était mal en point avant que vous ne le heurtiez. Poussez-vous donc que l'on puisse le ramasser. Et si vous voulez vous rendre utile ou vous faire un tant soit peu pardonner, indiquez-nous donc où nous pouvons trouver un soigneur. Un très bon. On a une blessée très grave en plus de celui-là.

Fynarine regarda en coin la femme qui lui criait dessus, sans trop comprendre comment elle avait réussi à déclencher ça. Les effets de cette lune semblait avoir bien plus d'effet ici que dans son pays, à moins que ce ne soit du à la ville...
Elle vérifia rapidement l'état de l'homme à terre, et confirma mentalement ce qu'on lui annonçait: il semblait surtout sonné et très affaibli, il tiendrait le coup et serait frais et dispo après une bonne nuit de repos.

- Une blessée? Où ça? Je suis moi-même clerc.

Elle regarda derrière les gens si quelqu'un suivait, mais ne vit personne. Elle se tourna de l'autre côté, et aperçu plus loin l'homme qui l'avait distraite et qui continuait à avancer péniblement dans la neige avec son fardeau. Prise d'un doute, elle demanda:

- Il y a quelqu'un dans la boule de fourrure que cet homme porte?

- S'il y a quelqu'un? Vous demandez s'il y a quelqu'un? Evidemment qu'il y a quelqu'un! Qu'est-ce que vous imaginiez? Que le fédorien se promène avec un poupon? Qu'il lui faut encore son doudou quand il fait nuit? Franchement!

- Lynn...

- Non mais quelle question idio...

- LYNN!

- QUOI?

- Elle a dit qu'elle était clerc.

- Et alors, qu'est-ce que ça peut me faire? Qu'elle soit servante, tenancière de bordel ou clerc je m'en... CLERC?

- Oui.

- Par les vents, VOUS ETES CLERC? Vous ne pouviez pas le dire plus tôt?!
Et l'autre tas de muscles qui ne s'arrête pas! HEY, MACHIN! LE FEDORIEN! ELLE EST CLERC!!! TU M'ENTENDS? CLERC!

Michael avançait à grands pas - du moins autant que possible étant donné la neige - et ne se retourna pas de suite en entendant les braillements de Lynn. Il était tant concentré sur son but : trouver quelqu'un avant de flancher, qu'il ne réagit pas tout de suite. Mais la jeune fille Levitis avait de ces douces voix qu'il était impossible d'ignorer longtemps. La mercenaire se retourna donc. Clerc ? Elle avait dit clerc ?
Il revint sur ses pas et jaugea la jeune -encore une- femme d'un oeil critique. Elle était bien couverte, contrairement à tous ceux de son groupe qui avaient décidé de sortir sans manteau, ce qui indiquait qu'elle réfléchissait. Et puis elle n'était pas Ilymis, cela se voyait à la couleur de ses yeux, de ses cheveux, de l'absence de bric à bras religieux. Pas une fanatique, donc. Bon point.
Il regarda celui qui l'accompagnait avec un peu plus de méfiance. Il était armé et portait une cicatrice en travers de son visage. Sa cape à écusson indiquait un homme de l'armée de Levitas.
Bon. Acceptons. Il le garderait à l'oeil.

Michael écarta un peu la fourrure de façon à montrer à la demoiselle clerc le visage de la blessée.

- Elle a perdu beaucoup de sang. Je ne suis même pas sure qu'elle soit encore consciente. C'est vraiment urgent, il n'y a plus une minute à perdre. Vous allez la sauver n'est-ce pas ?

Dans la bouche de Michael la question se voulait plutôt comme : "alors ? On commence?"

Il tourna la tête vers Lynn et réalisa qu'il y avait eu plusieurs inconnus dans cette grotte de l'enfer.

- Moi c'est Michael.

Il n'y avait pas d'animosité dans sa voix, son timbre était resté neutre. Il donnait juste une indication à la jeune fille. Puis il revint darder son regard sur la clerc.

Ridelgald se décida à cesser de dévisager les jumeaux. Leur tête lui disait vaguement quelque chose mais...
Un bref coup d'oeil au "fardeau" du Fédorien suffit à lui tirer une moue pessimiste : elle avait les lèvres bleues. Presque exsangue. Si rien n'était fait et si elle restait dehors dans le froid, cela ne serait plus très long.

Fynarine avait dû en arriver aux mêmes conclusions, car elle tourna la tête vers lui. Il prévint sa question d'un geste de la main et d'un gros soupir.

- Ca va, j'ai compris. Et j'en connais un qui ne va vraiment pas être content de voir le manoir transformé en refuge pour inconnus en péril. Enfin bon, je dirai que c'était mon idée, j'ai l'habitude de ses humeurs.

Il eut du mal à réprimer une petite grimace à cette perspective assez peu agréable, avant de reporter son attention sur le Fédorien.

- Gamin, tu es sûr de vouloir continuer à la porter ? On ne peut pas dire que tu ais l'air au mieux de ta forme, et il reste un bout de chemin à faire dans une couche de neige au moins aussi épaisse que celle qu'il y a ici.

Face à la furie qu'elle avait en face d'elle, Fynarine préféra s'abstenir de toute réponse ou réaction et attendre qu'elle ai fini. A grand renfort de cri de son compagnon, elle fini enfin par comprendre, et se précipita à la rencontre de l'homme au loin en criant de plus belle. Ils la suivirent avec le blessé qui trainait toujours dans la neige jusqu'à ce qu'ils rejoignent le Fédorien, où la clerc laissa son fardeau pour aller examiner la femme dans la fourrure.
Elle était vraiment mal en point, et en hypothermie, il leur fallait d'urgence un endroit chaud où l'installer. Fynarine jeta un coup d'oeil à Ridelgald, qui acquiesça sans hésiter malgré la probable réaction du maitre des lieux.

- Merci. On a pas vraiment le choix, il lui faut un endroit chaud et stable. Je ne suis pas certaine d'avoir les capacités de guérir certaines de ces blessures, mais si j'y arrive, il ne faudra plus la bouger, sinon ca n'aura servi à rien.

Elle laissa la fille au soin des deux hommes, et repartit sous le bras libre de l'autre homme blessé, prête à se remettre en route au plus vite.

"Gamin" ? Bien sûr. Voilà. Evidemment. Rencontrez un homme avec une cicatrice et sous prétexte qu'il a commencé à batailler avant vous, hop! Vous n'êtes pas à prendre au sérieux. Bien sûr.

- C'est bon Grand Père. Je la porte jusqu'au bout.

Oui "Grand Père". Il voulait marquer sa supériorité en âge ? Parfait. Mais Michael était responsable de la jeune femme et il ne la laisserait aux mains d'un ou une autre que quand il serait sûr de cet(te) autre.

*Allez encore un effort. Je peux tenir, là n'est pas la question. Enfin si cet endroit ne se trouve pas non plus à des dizaines de kilomètres. Faut pas abuser non plus.*

Il s'adressa aux autres :

- On les suit !

Puis à Fynarine avec un petit regard vers Ridelgald.

- Vous pouvez ouvrir la marche. Pressons.

*"Gamin". Tsssss.*

Ridelgald haussa les épaules avec un petit sourire, bien loin de s'offusquer.

- Amusant. Le capitaine m'a appelé comme ça aussi la première fois que nous nous sommes rencontrés.

Toujours souriant, il s'écarta et reprit la direction du manoir d'un pas égal en dépit de la couche de neige qui s'épaississait dans les rues un peu plus étroites que dans les quartiers dédiés à la religion.

- Tu devrais emboîter le pas à l'ancêtre, ça t'évitera de te fatiguer d'avantage... parce que là ça va commencer à faire un sacré paquet de patients pour la demoiselle.

Puis, avec un regard un peu malicieux vers la demoiselle en question :
- J'espère ne pas avoir à "convaincre" à nouveau qui vous savez...

Tout en parlant, il avait réussi à déblayer un chemin dans les congères et à prendre plusieurs mètres d'avance sans sembler forcer le moins du monde. A ce rythme -à condition de ne pas se tromper de route-, ils seraient vite devant les grilles du manoir.

*Et voilà le dernier. Courage.*

Aryllë trainait quelque chose de lourd dans la neige rouge. Un corps. Un corps sans vie et ce ne devait pas être le premier qu'elle trainait ainsi car il y avait un chemin bien creusé dans la neige, preuve de pas mal de passages.
Elle arriva au centre d'un carrefour de beaucoup de passage et posa son fardeau au milieu. A côté de 8 autres cadavres. Tous étaient vêtus de robes noires. Tous étaient les adeptes morts qui n'avaient pas disparu. La femme ôta le masque de celui qu'elle venait d'emmener et l'attacha à la ceinture de la toge de rituel.

*taptaptap*

Aryllë regarda sur le sol un peu à côté d'elle. Une botte tapait du pied dans la neige. Une botte noire mécontente.

*Oups.*

Au-dessus de la botte se trouvait un pantalon, puis une tunique, une ceinture à laquelle était accroché un impressionnant sabre et plus haut ... deux bras croisés.

*Ouille.*

Aryllë hésita mais ... autant affronter l'orage tout de suite. Elle leva la tête et deux yeux argent métallique la clouèrent au sol. Elle attendit la remontrance qui ne vint pas. Voronwë se contentait de garder le silence. Un silence particulièrement pesant. Aryllë attendit encore ... mais peine perdue. Elle devrait parler en premier. Et là, même le coup des yeux ne marcherait pas.

- Mais Voronwë, on était obligés de descendre ! Si tu as refusé que nous agissions, c'était pour éviter de faire le ménage pour les adreniens dans leur dos. Rappelle toi le compromis sur lequel nous sommes tombés d'accord : on démantèle les dangers que l'on peut mais en les faisant intervenir pour les mettre en garde. Le but est qu'ils prennent conscience de ce qui reste moisi dans leur système et qu'ils décapent tout ça. Regarde à Levitas, on a semé des indices, presque rien et ils se sont débrouillés tout seuls! Ils s'en sont très bien sortis !

Regard métallique toujours aussi vrillant. Silence écrasant.

- Bon certes, à Levitas, les adeptes étaient des amateurs. Aller ramasser des offrandes parmi le peuple était une idée complètement stupide. Comment ont ils pu penser que des disparitions inexpliquées n'allaient pas éveiller les soupçons ? Je me le demande encore.

Elle le regarda de nouveau. Le mur. Les nuages noirs qui s'amoncellent au-dessus de sa tête. Et Talisham qui n'arrive pas. Du soutien aurait été bienvenu. Juste parce que être deux à se faire enguirlander (même en silence) c'est toujours plus sympa que d'être un seul.

- Mais ceux d'Ilymir ce sont des professionnels. Consciencieux, réfléchis. Je ne sais pas qui était leur Grand Maitre mais alors lui c'était un adversaire de taille. Il a réussi à continuer ses messes noires pendant près de 10 ans sans éveiller les soupçons. 10 ans tu te rends compte de ce que ça fait?
A propos du Grand Maitre on ne l'a pas retrouvé. Nous avons trouvé 9 adeptes et 1 homme qui n'en était pas un. Enfin je ne crois pas, il ne portait pas le costume des autres. Il faudra demander à Adweliwen et Michael ce qui s'est passé en bas et tenter de savoir si ils les ont tous tués, combien y ont réchappé.
Et on a décidé de rassembler les adeptes ici comme ça demain, les ilymis les trouveront et ne pourront pas ignorer ce qui s'est passé chez eux.
Comme ça le contrat est respecté. Ce sont des adréniens qui s'en sont occupés, sans aide et les autorités sont prévenues. Tu vois ? On était obligés!

Voronwë secoua la tête en soupirant.

- Tu n'aurais pas dû descendre.

- Oui je sais ... mais je n'allais pas laisser Talisham porter tout le monde ! Et puis il faut que j'y retourne. Il faut brûler cette grotte infernale, purifier l'endroit, condamner les escaliers. Il y a là-bas des morts et de la vermine. Et surtout, d'autres pourraient vouloir utiliser l'endroit Il est vraiment "parfait" pour ce genre de choses.

Aryllë frissonna.

- Et trop bien camouflé. Si cette fille bizarre n'avait pas montré le chemin ...

- Aryllë cette fille ...

- Tu l'as reconnue aussi n'est-ce pas ? C'est celle du médaillon d'Ashk, j'en suis sure. Avec quelques années de plus mais elle a le même visage. Elle a gardé des traits presque enfantins, en fait. La teinte de ses yeux n'est pas la même mais Ashk lui-même a dit qu'il les lui avait peints trop sombres.

- Aryllë calme toi. Nous n'avons pas de preuves. C'est peut être juste une coïncidence.

- Mais ...

- Je refuse que tu en parles à Ashk. Tu imagines si tu lui dit avoir retrouvé son enfant et qu'au final ce ne soit pas elle ?

- Mais c'est elle !

- Non. Tu voudrais que ce soit elle. Tes désirs émoussent ton objectivité, ta lucidité. Sheenedra est morte il y a des années de cela. C'est ainsi. Ne fais pas ta Talisham, ne fourre pas ton nez partout. Tu pourrais blesser des gens. Les blesser au cœur. Il n'a pas besoin de ça. Et j'imagine que la petite non plus.

- La petite ... Où est elle?!

La femme regarda de tous côtés.

- Et où sont ils tous ? Ils dovent avoir besoin de soin, tu vas pouvoir t'en occuper, tu ...

- Je les ai manqués mais ils ont trouvé quelqu'un pour s'occuper d'eux, sois tranquille. Maintenant où est la dague ? Est-elle encore en bas ?

- Je ne crois pas. Ni Talisham ni moi ne l'avons vue. Adweliwen a dû la récupérer, après tout elle est descendue pour ça.

Talisham peinait un peu à remonter le dernier cadavre. Lors de la chute de l'ascenseur, il s'était arrangé pour amortir la chute d'Aryllë. L'ombrageux de service l'aurait trucidé si elle avait été blessée. La difficulté avait été de faire passer ça pour un hasard total... Et heureusement qu'il y était parvenu. Il imaginait la discussion qui s'en serait suivie dans le cas contraire...

*- Quoi, tu ne me penses pas capable de me réceptionner toute seule!
- Mais...
- Attends, je vais te montrer, tu vas voir que je peux!*

Hum, oui mieux valait avoir évité ça.

*Ah, j'y suis presque.*

En plus, cette dépouille-là était particulièrement répugnante, avec ses tripes encore fumantes qui commençaient à embaumer.
Il leva le nez du sol pour se repérer.

*Oh-oh.*

Voronwë était en grande discussion avec Aryllë... Talisham soupira.

*En avant pour le savon.*

Il posa le corps avec les autres, puis recula pour observer l'effet produit. Il grimaça de dégoût.

*Si ça, ça ne suffit pas pour attirer l'attention de ces grenouilles de bénitier, je ne sais pas ce qu'il leur faut. Bon...*

Il plaqua sur son visage le sourire du type parfaitement détendu qui n'a absolument rien à se reprocher, et rejoignit ses compagnons.

- Bon, et bien voilà qui est fait. Il est bien dégueu celui-là, avec ses boyaux qui vous font de l'oeil comme ça...
Tiens, Vor, te voilà enfin! Tu abuses quand même, se planquer pour échapper à la corvée, c'est pas sympa!

Aryllë tressaillit en entendant Talisham. Etait il fou de provoquer Voronwë ainsi ? N'aurait il pas mieux fait de baisser la tête et tenter de faire passer Vor à autre chose ? Mais ce n'était pas le genre de Tal de baisser la tête. Non il fallait toujours qu'il regarde le danger en face ... avant de se carapater !

La respiration de l'homme-orage s'accéléra et ses narine s'ouvrirent toute grande. Ses poings de crispèrent.

- Tu te fiches de moi ? gronda-t-il. Puis il explosa. Les nuages noirs s'étaient percutés et se déchiraient maintenant, les éclairs fusaient, le tonnerre assourdissait tout.

- Comment as tu pu descendre, je t'ai demandé de la surveiller ! Tu sais qu'elle est une cible facile et que si quelque chose arrive nous n'avons pas la pierre ! Et si le danger avait encore été là, hein ? Et si la lame de la dague l'avait blessée, qu'aurais-tu fait ? Qu'aurais-tu fait, dis le moi !

Penaude, Aryllë lui toucha la manche et dit d'une toute petite voix :

- Voronwë tu tempêtes trop fort. Nous devons être discrets, rappelle toi ...

- Discrets ? Voronwë rugit de plus belle. Mais bon sang où est-ce que vous avez la tête tous les deux ! Je n'ai pas demandé ça par plaisir ou pour m'amuser de vous donner des directives. Si on avait arraché son âme à Aryllë cette nuit, est-ce que tu aurais fait ce qu'il fallait ? Est-ce que tu aurais de toi-même mis fin à sa vie ? Réponds moi Talisham !

Ce n'était plus de la colère, ni de la rage ni même de la fureur. L'homme-orage avait dépassé tout cela.

Aryllë eut peur. Elle connaissait les effets des artefacts dont ils étaient gardiens. Elle les connaissait mais n'avait pas imaginé un seul instant qu'il eussent pu être dangereux pour l'un d'eux. Elle n'avait pas songé que ... oui. Si Talisham avait été touché, c'est elle qui aurait dû le tuer. Tuer Talisham ? Tuer l'un de ses compagnons ? De sang-froid ? Mais même en sachant que c'était un devoir, que c'était inévitable, qui pouvait faire cela ? Qui ?

Et puis elle songea à l'équipe qu'ils avaient envoyé là-dessous. Est-ce que ... Et si l'un d'eux avait été touché ? la femme sentit son cœur s'arrêter dans sa poitrine. Elle devait aller voir cela et vite. Voyons les traces ... là ... et là ... vite !
Laissant là ses compagnons, elle courut vers le manoir où la fine équipe s'était réfugiée.

Peut-être avait-il poussé un peu loin la provocation. Mais mieux valait que Voronwë explose maintenant plutôt qu'après avoir ruminé des heures.
Talisham ne connaissait que deux façons d'essuyer une tempête: accompagner le mouvement, ou traverser carrément. Il avait pensé pouvoir glisser sur celle-ci et s'en tirer par une pirouette ou deux. Il en fut pour ses frais.
Les rafales de mots le percutèrent de plein fouet, et il se sentit se recroqueviller à mesure que les phrases déferlaient. Parti confiant, il n'avait pas songé un instant à la dague et aux terribles dommages qu'elle pouvait causer.
Il pesa soigneusement ses paroles avant de répondre.

- Elle est visible certes, téméraire, sans aucun doute, mais n'est pas une cible si facile que ça. Elle sait se défendre. Et j'étais là. Pour qu'elle soit atteinte, il aurait d'abord fallu que je sois mort. - il était mortellement sérieux en disant cela - Tu as raison toutefois. L'artefact... les risques étaient minimes, mais réels. J'ignore ce que j'aurais fait alors. Qui peut prétendre savoir comment il agirait dans une situation pareille? Qui se connait suffisamment pour cela? Je ne peux répondre à ta question Voronwë, et j'espère que jamais je n'aurais à le faire.
- il baissa la tête - Rien n'est arrivé, mais je suis impardonnable pour avoir laissé ne serait-ce que la plus infime occasion de voir cela se produire avec une des nôtres. Néanmoins... - il se redressa et plongea son regard reptilien dans les yeux de Vor. - Valons-nous mieux que ceux que nous avons envoyé là-bas? Sous prétexte de les laisser se débrouiller avec leurs problèmes, avons nous le droit de les laisser... non, de les pousser à s'exposer aux conséquences sans prendre notre part de risques? Les cultes immondes - il cracha par terre avec dédain - ça les regarde, mais qui devait garder la dague? Nous.
ça te travaille aussi n'est-ce pas? Comme nous tous. Et tu connais Aryllë non?
Alors je te retourne tes interrogations Vor, si ce n'est pas l'un d'entre nous, mais l'un d'eux qui a été touché, tandis que nous sommes restés à regarder sans rien faire, ferons nous ce qu'il faut? Et lesquels d'entre nous verront leur âme détruite par la culpabilité aussi sûrement que si elle avait été soufflée par la lame maudite?

- Tu as raison, nous avons notre part de responsabilité. Et une sacrée part.

Voronwë sembla se calmer. Du moins, il ne criait plus. Il pressa l'épaule de son compagnon.

- Allons voir leur état. Discrètement. Je suis sure qu'elle est déjà là-bas et qu'elle passe outre les consignes de sécurité.

Il secoua la tête, dépité.

- Elle est intenable...

L'homme-orage commença à s'éloigner dans la neige.

- Et s'ils ont besoin de soin, nous verrons en temps voulu. Mais cela devrait aller, ils sont avec une personne ... comme je les aime. Un sacré caractère et une loyauté à tout épreuve. Le problème c'est qu'il est loyal à différentes choses ou personnes, et que tout cela ... est parfois difficile à agencer. Voire impossible. Il a des choix difficiles à faire, il y aura toujours des personnes au détriment de qui seront ces choix. Ou ont été.
Un type ... surprenant.

Il songea quelques instants à leur compagne qui -il en aurait mis sa main à couper- se trouvait au même endroit que cet homme-là et accéléra le pas, soucieux, méfiant.

- Tal, prie pour qu'elle ne se mette pas dans la tête de s'occuper de celui-là.

Il n'ajouta rien. Talisham pouvait facilement deviner la menace latente des actions d'une pareille tête-brûlée.

Le quartier bâti autour du grand temple était plutôt animé à cette heure, et Lynn avait des passants une conscience de plus en plus aiguë. Elle sentait s'éveiller en elle une faim dévorante, un appétit insatiable...
Mais elle était accompagnée...
Pour ne pas sombrer dans le gouffre qui s'ouvrait dans son esprit, la levitis tenta de continuer à parler à Fanaa. Ses pensées suivaient leur cours...

"Les ennemis sont partout. Ils font semblant de nous ignorer, pour nous tomber dessus lorsque nous relâchons notre vigilance. Si on veut les tenir à l'écart, il n'y a qu'une solution: les piéger avant qu'ils ne nous piègent. Leur rappeler que l'on sait se battre..."

Le Phéazarix se mit à pépier plaintivement, sentant venir l'orage...

"Tu comprends Fanaa?"

Fanaa s'était laissée entraîner par Lynn. Elle avait envie de rester auprès de l'homme évanoui ... mais la levitis avait raison de l'éloigner de sa victime. Lynn la tirait gentiment par la main mais marchait quand même un peu vite. Fanaa trébucha quelques fois mais réussit à suivre tout de même. Elle écoutait Lynn, mettant toute sa bonne volonté à intégrer les notions auxquelles la levitis faisait allusion.
Des ennemis ? Partout ? Mais alors le monde était très dangereux !

Fanaa lâcha, sur un ton sincèrement désolé :

- Mais Lynn ... Je ne sais pas me battre moi ...

Déclic. Chute.
Eyrol paniqué bondit sur Fanaa. Elle n'était ni la Mère ni le Compagnon, mais au moins elle n'avait pas cette odeur dérangeante...

"Tu ne sais pas te battre? Oh. Il te faut apprendre alors. Et en attendant, je me battrai pour toi."

Son regard avait changé, ainsi que sa posture, sa façon de marcher...
Lynn avait maintenant des airs de prédateur. Un sourire carnassier s'étalait sur son visage.

"Que dirais-tu de prendre maintenant ta première leçon de chasse? - elle n'attendit pas la réponse de Fanaa -
Alors... Pour commencer, il faut choisir un animal à séparer du troupeau. Les très jeunes et les femelles ne comptent pas, car l'Ennemi ne leur porte aucune considération. Il les considère comme sacrifiables. Pour le toucher, il faut s'en prendre directement à lui.
- tout en parlant, elle désignait les passants - Regarde, celui-ci représenterait une proie intéressante. Solidement bâti, sans doute difficile à épuiser, apte à se défendre un minimum. Il lance des regards lubriques à la ronde, facile à appâter donc...
Celui-là est plus jeune, plus tendre. Inexpérimenté, il tombera aisément dans un piège simple, mais peu aussi s'effrayer d'un rien et s'enfuir. Un gibier à choisir si l'on veut faire un peu de course, ou s'exercer à la traque.
Pour aujourd'hui, on ne va pas chercher le défi... Hum... Tiens, là. Plus de la première fraicheur, mais on s'en contentera. Suis-moi à quelque distance, et observe bien surtout."

Lynn approcha d'un homme assez âgé, qui semblait avoir un peu de mal à marcher.

"Bonjour messire. Belle journée n'est-ce pas? Excusez-moi de vous déranger mais... - elle fit une moue - mon amie là-bas et moi-même venons d'arriver ici, et nous ne connaissons personne. S'il vous plaît... - son ton devint implorant - les caravaniers avec qui nous avons voyagé nous ont trompées, et dépossédées de tous nos bien. Vous avez l'air prospère messire, peut-être pourriez-vous... Mais bien sûr, nous vous offrirons quelque chose en échange. Ce qui nous reste... Elle avait chuchoté ces quatre mots à son oreille, tout en posant la main sur sa cuisse.
Vous pourriez même en avoir un avant-goût maintenant si vous connaissez un endroit tranquille. Vous imaginez? Deux jeunes filles pour s'occuper de vos vieux jours..."

La lueur qui s'alluma dans les yeux de l'homme montrait clairement qu'il imaginait tout à fait la scène...

"Et bien... je n'habite pas très loin... et je vis seul... si..."

"Parfait. Ce serait parfait."

Lynn s'accrocha au bras de l'homme en minaudant. Oui, il suffisait de ça pour faire tomber l'ennemi dans ses filets... Facile, facile. Elle fit discrètement signe à Fanaa de se rapprocher.
Effectivement, l'homme vivait très près...
Elle passa la porte à sa suite, attendit Fanaa avant de refermer...
Clang.
L'homme essaya de tirer Lynn plus avant dans la maison, mais elle s'était arrêtée dans le vestibule et ne se laissait pas entraîner.

"Tu vois petite, ce n'est pas très compliqué. Ils sont tous pareils."

"Mais, mais, mais... qu'est-ce que vous racontez?"

"Une fois qu'on a isolé la proie, on peut choisir de jouer, de prendre son temps... quand cela présente un intérêt. Là, ce n'est pas vraiment le cas... Contentons-nous de savourer cet instant... la victime comprend qu'elle s'est faite avoir, se pénètre de l'idée qu'elle va mourir..."

"Arrêtez! Lâchez-moi..."

L'homme commençait à sérieusement paniquer. La poigne de Lynn sur son bras était devenu un étau qui l'emprisonnait. Et cette femme disait des choses... et elle avait de ses yeux...
La levitis leva sa deuxième main. L'air autour semblait onduler...

"Et c'est la curée!"

La main s'abattit. L'homme hurla tandis que ses chairs se fendaient comme sous l'action de griffes invisibles. Le sang jaillit. La main s'abattit de nouveau. Encore. Et encore. Le cri mourut en même temps que l'homme...
Mais Lynn ne s'arrêtait pas. Elle frappait des deux mains à présent, éclaboussant de rouge les murs, le plafond, elle-même...
Enfin elle cessa, haletante.

"Voilà... les bases..."

Une ombre bienveillante observait la scène à quelques pas de la maisonnée.
Ce genre d'ombre qu'on ne sait si on doit aimer, détester, chérir ou simplement rejeter...
Ce genre d'ombre qui fait dire "oh non, pas elle..." en la voyant et qui provoque un soulagement quand elle disparait de la circulation.

La mission Fanaa était terminée depuis longtemps et la mort avait continué ses ouvrages pendant ces longues semaines.

Elle se rappelle encore des ordres de son vénéré maître Valnor et de l'ensemble de l'échec qui s'en est suivi.
La perte de mémoire de Fanaa, les excuses de la Lun et l'attitude inhabituelle du grand lunaire avaient provoqué une frilosité à parler de Fanaa au sein du peuple de Lun, et pourtant...

Lunelia était là, présente dans l'ombre de la demoiselle et la suivait secrètement depuis tout ces évènements, comme si quelque chose l'avait envouté, comme si un spectre inconnu planait au dessus de sa tête.

Elle souriait en observant le sang couler sous de la porte de la chaumière, elle en riait même !
La douleur infligée par les cris de l'homme agé lui imposait son habituelle souffrance, mais une certaine satisfaction l'envahissait.

Cette douleur était agréable, elle passa sa main dans sa chevelure soyeuse pour profiter de l'instant présent. Elle ne se demandait même pas pour quelle raison cela la rendait heureuse, ceci était comme ça et cela lui convenait parfaitement.

Reprenant ses esprits, elle s'avança vers la maisonnée, fit le tour discrètement en sautillant et se posta devant la porte avant de tapoter frénétiquement sur le bois vieilli, le tout après quelques longues minutes d'hésitation.


- Toc, toc, toc, toc, toc, toc, toc, toc !

Tout en continuant de plus en plus vite, elle cria suffisamment fort pour que les invités de la demeure entendent ce qu'elle avait à dire.

- Félicitations mesdemoiselles, youhouuuu ! auriez-vous l'obligeance de m'ouvrir que je contemple le chef d'œuvre s'il vous plait ? L'art sanguin est un des plus beaux qui soit dans ce bas monde...

Laissant un temps de silence vocal, elle conclu sur un ton beaucoup plus excentrique.

- N'est-ce pas ma très chère amie Fanaa, hi hi hi !
Toc, toc, toc, toc !

Docile, Fanaa avait suivi Lynn dans les rues de la ville, elle avait bien écouté les conseils et recommandations de cette dernière, éprouvant tout de même un certain malaise aux mots, à l'attitude de la levitis.

Et puis ... et puis ce fut magique, splendide, spectaculaire. Dans la maison du vieux, le rouge s'était installé. Des feux d'artifices, des fleurs sanglantes avaient éclos et redécoré l'endroit. Le rouge, le rouge était partout et Fanaa observait, émerveillée, ce que Lynn avait créé.

Lynn savait peindre le monde en rouge !

Les yeux de la jeune fille brillaient et elle ouvrit les bras, émerveillée, comme lorsqu'elle arrivait devant le lac Ryma.

- Ooooooooooh ! C'est beau !

Elle tourna sur elle-même, admirant le sol, les murs, le plafond, l'écarlate était partout, partout ! Fanaa sourit, s'approcha du mur, toucha le rouge et ses doigts tracèrent le double S au mur. Sa main s'anima et de nouvelles lettres s'ajoutèrent toutes seules ... "Y" "L" "D" ...

La jeune fille se retourna et alla enlacer Lynn tendrement.

- Je t'aime Lynn ...

L'étreinte était toute pleine de reconnaissance, d'admiration aussi. Les premières secondes. Puis Fanaa ressentit autre chose. Un malaise encore, peut-être dû à la tension d'Eyrol sur son épaule ? Ou alors à la raideur de Lynn, à sa respiration saccadée ? A son silence étranger après son discours ? Chez la levitis, quelque chose n'allait pas. Fanaa se sentit touchée par cette impression de ... détresse ? Elle ne prit pas le temps d'analyser la sensation mais son sourire disparut. Lynn était triste et de fait, Fanaa l'était aussi. Pauvre Lynn... La "petite" la serra plus fort, pour la soutenir, la consoler peut être ...

- Je t'aime Lynn ! répéta-t-elle.

Dans le même temps, sous le contact des doigts de la Chandlune, les traces de sang sur les vâtements de Lynn s'estompèrent puis s'effacèrent tout à fait. Fanaa s'était dit que ce n'était pas agréable d'avoir du rouge d'un autre sur soi. Et peut-être que cela aussi dérangeait Lynn.

C'est alors que les coups à la porte retentirent, de plus en plus fort, de plus en plus vite, et que la voix se fit entendre. La voix. Qui prononça son nom à elle. Danger.

- Lynn ... gémit Fanaa.

Dans un grincement, la porte s'ouvrit timidement. Lunelia en profita pour rentrer en hystérie dans la pièce en ignorant totalement les protagonistes présents à l'intérieur et le "sourire" qui lui est adressé.

Avec des yeux brillants d'admiration, elle tourna sur elle même en regardant la pièce tapissée de sang.

- Youhou ! Mais c'est ma-gni-fi-que, gran-di-ose ! Quelle artiste très chère Fanaa, vous m'impressionnez !

Fanaa... Fanaa... Ah oui évidemment elle avait totalement zappé les deux femmes.
Dans un éclair de conscience elle s'arrêta, les regarda, et se retourna à nouveau pour "recoller" les morceaux de chair et d'os éparpillés afin des les réduire consciencieusement à néant.

Priant le seigneur Valnor et l'entité harmonique du peuple, elle récita un petit vers :

- Repose en paix mon petit, qui que tu ais été, ta souffrance est finie.

Sa prière terminée, elle se releva doucement, le visage grave... tout du moins, seulement l'espace de quelques secondes.

Elle se remis à sautiller de joie avant de se rapprocher de Lynn.

- Vous êtes la responsable de ce bain de sang ? Vous savez que ce n'est pas bien, mais alors pas bien du tout de faire souffrir les gens avant de les achever ? Un peu de délicatesse rendrait votre art encore plus magnifique.

Puis ignorant complètement sa réponse quelle qu'elle soit, elle se tourna directement vers Fanaa et l'embrassa sur la joue rapidement.

- Très chère, vous allez bien depuis le temps ? Vous vous rapellez de moi ? Non ? Ohhhhhh...

Ne laissant pas le temps de répondre à Fanaa, elle pris un air triste et déçu, à la limite des pleurs.

Lynn bondit en arrière lorsque la… la quoi au juste ?
Impossible de mettre des mots là-dessus.
Le corps de la femme ne semblait pas plus tenir en place que son esprit ou sa langue.
Une seule chose était sûre : elle était dangereuse. L’instinct de Lynn tirait violemment sur la sonnette d’alarme, et dans l’esprit de la Levitis ce fut le choc des titans entre deux tendances fortement ancrées: « protéger sa propre vie », et « protéger ceux qui comptaient pour elle »...
Quand Lunelia s’approcha de Fanaa, la seconde gagna instantanément par KO.

Lynn bondit pour se placer devant Fanaa. Elle se tenait genoux fléchis, ses deux mains aux doigts recourbés levées à hauteur d’épaule et prêtes à frapper. Un rictus mauvais lui déformait le visage, découvrant légèrement ses dents.
Elle eut un geste rapide de la main gauche, et les griffes d’air tracèrent cinq sillons parallèles sur le sol juste devant Lunelia.
*Menacer, mais sans attaquer* lui soufflait son instinct.
Le grondement était presque audible derrière les mots lorsqu’elle parla.

" Ne vous avisez pas de la toucher de nouveau sans son autorisation expresse. Qui êtes vous ? Qu’est-ce que vous voulez ? "

Fanaa fixait la nouvelle venue avec effroi. Elle avait les yeux rouges ... tout rouges ... et elle connaissait son nom ... sauf que Fanaa ne la connaissait pas. Et que cette dame aux yeux écarlates lui faisait peur.

Mais Lynn était là! Lyn qui se plaça entre elle et la dame, Lynn qui la protégeait et qui avait raison : le monde était plein d'ennemis. La nouvelle venue en était forcément une !

- Fais attention Lynn ...

Lynn qui avait voulu lui apprendre à se défendre. Fanaa réfléchit qu'elle devrait se placer à côté de la levitis et l'imiter, se battre elle aussi ... sauf que ça ne collait pas. Admirer le rouge sur les murs était une chose, aller soi-même arracher le rouge à quelqu'un ... Fanaa frissonna. Est-ce qu'elle pourrait faire cela ? En serait elle capable ?

Non.

Tuer ... lui était inconcevable.
Alors devait elle laisser Lynn se battre toute seule ? Mais ça pouvait être dangereux ! Que faire ? Par le rouge, que faire ?

La lunaire contempla la petite scenette qui se déroulait devant elle tout en gardant un sérieux exemplaire.
Elle contempla longuement Lynn d'un air interrogateur.
Elle inclina ensuite doucement sa tête vers la gauche, puis vers la droite, puis encore vers la gauche, avant de lever les main signifiant qu'elle ne leur voulait aucun mal.

S'agenouillant en gardant la position du "haut les mains", elle fini par les baisser afin de caresser doucement la marque au sol avant de faire ses commentaires.
Elle se parlait à elle même à haute voix, n'étant pas du tout consciente de son environnement, à moins qu'elle n'en ait cure...

- Un elixia net et propre de type air, je comprend comment a été créé cette oeuvre maintenant.
Quelle belle vision de la puissance de l'elixia non-maitrisé hi hi hi.

Puis levant les yeux et fixant Lynn, elle lui retorqua, outrée et faisant la moue :

- Humf ! Cependant quel manque de politesse envers une prêtresse de mon rang et quel outrage à l'harmonie de l'elixia...
De plus, on se présente avant de demander, ceci est la moindre des choses...

Elle poussa un soupir et se releva doucement.

- Pfff... voyez ma chère, je m'appelle Lunelia, haute prêtresse du peuple de Lun, seconde de votre ennemi Valnor.

Sentant la colère et l'horreur monter d'un cran au sein de la chaumière, elle enchaina directement en levant un doigt.

- MAIIIIS ! Je ne suis PAS ici sous les ordres de mon maître et je n'ai AUCUN dessein agressif à votre égard.
Je désire juste discuter tranquillement.

Bien sûr que son argument n'allait pas être plausible, même si celà s'avérait être la vérité.
Elle ne laissa cependant pas le temps aux auditeurs de reprendre leur souffle.

- Hum, vous n'allez pas me croire et je vous comprend tout à fait mes chères.
Comment vous dire, j'ai pris soin de faire en sorte la milice extérieure qui vous avait remarqué ne vous cause aucun ennui pendant toute la durée de mon séjour ici, si vous voyez ce que je veux dire... Je ne tiens pas à avoir des troubles fêtes pendant que nous prenons du bon temps entre amies, hi hi hi.

La prêtresse s'assis calmement, ne considérant aucunement "Lynn" comme une menace, avant de se remettre à parler.
Elle invoqua une petite théière et des tasses puis se mis à servir un "thé lunaire" fourré d'Elixia revigorant avant de prendre une tasse et de siroter.

- Hi hi hi, dé-li-cieux ! Je suis vraiment douée pour faire du grand thé, il faudra que je me reconvertisse la dedans !
Entre nous, ne pensez-vous pas qu'en tant que seconde du grand Valnor, si j'avais eu la quelconque envie de vous massacrer, je l'aurai déjà fait depuis longtemps? D'ailleurs, quelles raisons aurais-je à vous tuer ? Aucune à ce que je sache...
Votre méfiance est justifié jeune demoiselle, mais je sens qu'en vous, vous êtes quelqu'un d'intelligent et de raisonnable qui désire rassasier sa curiosité.

La Lun tapotta le sol doucement en guise d'invitation amicale.

Allons, allons, venez et asseyez-vous tranquillement s'il vous plait, cette oeuvre mérite d'être contemplée et appréciée comme il se doit.
De plus dame Fanaa à tout le temps qu'il faut pour ça. dit-elle en désignant la fenêtre du bout de son index.

Dehors, le temps semblait totalement arrêté, rien ne bougeait et aucune âme qui vive ne se manifestait dans le paté de maison.