Nolad - plaines

- Cela ne m'ennuie nullement.

Earl posa la la plume cassée et reprit celle encore intacte. Il tapota l'extrémité un peu effrangée contre le bout du nez de la Dédrane penchée au-dessus de lui.

- Si vous savez quoi dire, ne vous privez pas de le coucher sur papier. Pour ma part j'ai un peu l'impression de chercher des excuses destinées à une épouse possessive. Non pas que j'imagine aisément Ridelgald en jupons, mais...

Mellyna fronça le nez, ça chatouillait. Elle se saisit de l'objet agaçant.

-Merci.

La dédrane rit de bon cœur à l'évocation.

-Bah, il sera surement déjà rassuré de vous savoir en vie et en bonne santé. Pour ce qui est des excuses... Je ne peux pas vous aider : les relations de couple sont loin d'être ma spécialité. Pour ma part je m'en tiendrais aux faits, enfin je vais essayer. Conclut-elle en soupirant.

Elle s'installa sur le bureau, croisa les jambes et prit appui sur sa cuisse pour écrire. Les lignes étaient régulières malgré la position inconfortable. Sa main gauche traçait des lettres claires mais stylisées, comme dans les vieux livres. Elle tira un peu la langue de concentration à certains passages, se gratta trois ou quatre fois la tête, soupira dix. Au bout d'une quinzaine de minutes, elle leva la feuille et la plume, victorieuse. Une vingtaines de lignes composaient son message.

-Voila !

Elle tendit la plume à Earl.

-A votre tour.

Il récupéra la plume avec un soupir et resta quelques instants à la tapoter contre l'accoudoir de son fauteuil.

- Bon, soit.

Du bout du doigt, le Lévitis fit glisser une feuille devant lui puis y écrivit cinq lignes nettes d'une seule traite. Il secoua un peu le parchemin pour sécher l'encre avant de le plier.

- Dans ce cas précis, le mieux est sans doute de ne pas chercher à prévoir la réaction du destinataire.

Avisant le morceau de cire, il s'en saisit et l'apposa sur le rabat du message après avoir simplement passé son pouce sur l'extrémité du bâtonnet. Apparemment la chaleur d'une chandelle était superflue pour lui.
Il rajouta enfin ce qui ressemblait à une rune dans un de coins de la missive.

- De toute façon il a un flair inexplicable pour deviner quand j'essaye de le mener en bateau.

La gardienne opina du chef pour signifier son assentiment.
Elle prit la cire à son tour et fit un cachet sur le parchemin.

-Bon, je vais porter ces lettres à Tilly avant que nous ne changions d'avis ou qu'une catastrophe imprévue nous fasse oublier les lettres.
Si j'adresse la votre à l'invité des Ilahi ce sera suffisant pour retrouver Ridelgald sans vous procurer d'ennui, ou avez-vous pensé à une autre formulation ?
J'en profiterai pour contrôler qu'il a bien prit soin de la jambe de votre étalon et des chevaux en général...

- Dites simplement qu'elle doit être délivrée au Sanctuaire.

Earl frotta son index et le pouce avec lequel il avait fondu la cire, pensif.

- Ce n'est pas comme s'ils recevaient souvent des missives écrites. Elle finira entre les mains de Nuadi ou Nuada, et eux sauront reconnaître mon chiffre dessus. Ils transmettront.

-Oui, c'est logique. Je n'y aurais pas pensé. Bon, je reviens.

Sur ces mots, elle tourna les talons et descendit aux écuries pour chercher Tilly. Le dragonnet oublié sur une table, fut obligé, pour une fois, de se déplacer par ses propres moyens et de suivre la dédrane en voletant près d'elle.

Les écuries étaient bien placées, sous un grand arbre, elles étaient plongées dans une légère pénombre et il n'y faisait pas trop chaud.
Mellyna tomba sur le box alloué à leurs chevaux avant de trouver le garçon d'écurie. Elle en profita pour les chouchouter un peu et les passer en revue. La plaie de l'étalon avait été bien pansée, les sutures étaient propres et le pansement refait de neuf. Elle le remit en place rassurée.
Ils avaient l'air reposé, leur pelage avait été nettoyé et luisait presque. De l'avoine dans leurs écuelles et de l'eau propre étaient facilement accessible.
*Ce petit Tilly est sérieux, c'est bien. *
Son inspection finit, elle se mit en quête du garçon. Elle le trouva allongé dans le foin, comme prévu. Elle s'agenouilla à côté de lui et le secoua en douceur :

-Rebonjour. La fille du patron m'a dit que je pouvais compter sur toi pour délivrer des messages à Fédoran. C'est possible ?

Le garçon cligna des yeux et, rouge pivoine, essuya frénétiquement le filet de bave qui avait coulé le long de son menton pendant sa sieste.

- Fé... qu... ah, Fédoran.

Il éternua pour se débarrasser de la poussière qui lui chatouillait le nez.

- Faut que je les remette à qui ?

-A des commerçants du désert. Ils devront les remettre au Sanctuaire.

Thani finirait bien par y repasser, on la lui remettrait alors. Oui, ce serait plus pratique que de faire courir un messager dans tous les villages à sa recherche. Mellyna avait prit soin d'écrire le destinataire à côté du sceau, il ne pourrait pas y avoir de méprise.
La dédrane tendit les deux lettres au garçon encore ensommeillé.

-Ne les oublie pas s'il te plait, c'est important.

Elle lui donna un beau supplément de zoris pour stimuler sa mémoire.

-C'est pour les chevaux et les parchemins. Merci de ton travail.

Mellyna se releva souplement, laissant Tilly se rendormir à sa guise. Vu les yeux qu'il avait fait devant les pièces, il ne devrait pas oublier sa mission.
Elle regagna tranquillement l'étage, frappa à la porte et entra en suivant.

-Ça devrait aller. Fit-elle au lévitis, puis se dirigeant vers le lit et enlevant ses bottes au passage :
Bon, sieste maintenant.

Sans en ajouter plus, elle se coucha dans un coin du lit en position fœtale tout en s'enroulant dans la couverture.
*Ça sent bon.*
Fut sa dernière pensée consciente, elle s'endormit en quelques secondes.
Le lézard vérifia du bout du museau qu'elle dormait bien avant de rejoindre le lévitis, il se posa sur l'accoudoir du fauteuil et lui murmura, sans quitter l'endormie du regard.

-Melly Oity, neuiss t'ruili ronuya tre.
*Melly ne va pas bien, il va falloir qu'elle y retourne très vite.*

- She-ake, j'ai vu, répondit Earl sur le même ton.

Il s'appuya lourdement contre le dossier.

- Et l'endroit où elle doit retourner, c'est la forêt ?

Toujours dans la langue chantante du désert, il rajouta pour lui-même :

- Bein sûr que c'est la forêt, et pas le désert.

On ne réitérait pas par écrit une rupture avec quelqu'un juste avant de regagner l'endroit où ce quelqu'un vit. Où la Dédrane aurait-elle pu "retourner" si ce n'est dans la forêt ?

- Tu connais la raison ? Elle était en larmes il n'y a pas deux jours à cette idée, quand même. Je vois bien qu'il y a un problème physique mais...

Le dragonnet dévisagea le lévitis pendant quelques secondes, comme s'il réfléchissait à ce qu'il pouvait lui dévoiler, avant de répondre dans la même langue :

-C'est le pacte de sang. Elle est en train de le rompre, la forêt ne le tolérera pas.

Ce secret ne lui appartenait pas, mais la jeune femme avait besoin d'aide. Une aide qu'elle était trop orgueilleuse pour demander. Il ne la laisserait pas mourir bêtement, pas elle, pas question. Le lézard toucha du museau le torse du lévitis, au niveau du cœur.


- Ils l'ont conclus à cet endroit. L'organe est malade et s'arrête de battre par moments. Seule sa mère peut défaire le pacte. Ou peut-être la dryade. Elle est venue la mettre en garde au lac... J'ignore les détails, mais elles ont dû la repérer quand cette idiote a soigné l'arbre.

- J'ai du mal à saisir. Si c'est ainsi qu'une ancienne forêt influe sur ses enfants, en les enchaînant, les blessant, les enfermant contre leur volonté, pareil endroit ne mériterait guère mieux que de brûler jusqu'aux racines. Les forêts sont censées représenter la vie, pas l'inverse.

Earl secoua lentement la tête puis appuya la joue contre son poing fermé, bien calé dans l'angle de l'accoudoir.

- une idée du délai avant que cela ne devienne réellement problématique ?

Le regard du dragon brilla bizarrement.

-Si j'en avais le pouvoir, ce serait déjà le cas.

Il tourna une nouvelle fois la tête vers sa protégée.

-Cependant, je crois que je ferais de même si elle venait à partir : vouloir la retenir à tout prix, par tous les moyens, une fois que les mots ont échoué. L'amour peut prendre bien des formes et les dragons sont possessifs... Les forêts aussi visiblement.

Un silence un peu trop long accompagna la question du lévitis.

-Pas assez j'en ai peur. A vu de museau, quelques jours, deux semaines tout au plus. Si la mère de la forêt en décide autrement, c'est une question d'heures.
Je ne sais pas comment la soustraire de son influence. En attendant, il faut qu'elle y retourne. Des idées ?

- La retenir au point de la tuer ?

Le Lévitis haussa un sourcil.

Il garda le silence quelques secondes.

- Ce n'est...

Trois petits coups à la porte le firent se redresser.

- Messire ?

C'était la voix de la fille du propriétaire. Earl alla entrouvrir et manqua prendre un coup de botte dans le nez. Les chaussures redescendirent, dévoilant le visage victorieux de la demoiselle.

- Le fripier avait celles-ci dans son chargement et...

Earl leva un doigt devant ses lèvres pour lui intimer de parler moins fort. Un peu étonnée, elle se baissa un peu pour glisser un coup d'oeil vers le lit par dessous le bras du Lévitis, mais celui-ci se décala pour lui boucher la vue.

- Fort bien. Combien en veut-il ?
- Oh... il... il a parlé de vingt zoris, répondit la gamine dans un murmure, mais...

Ce roublard avait reniflé un client qui ne pouvait se permettre de trop marchander. Soit il payait, soit il repartait pieds nus.
Earl se saisit des bottes.

- Bon, ça ira.

Il remit la somme à la jeune fille et esquissa un mouvement pour refermer la porte avant de se raviser :
- Oh, tant que j'y pense, si vous pouviez mettre en ordre les herbes médicinales dont vous seriez disposée à céder une partie, et déterminer le prix à l'once que vous en demanderiez... la dame descendra sans doute plus tard jeter un coup d'oeil. Je souhaiterais juste que cela puisse se faire le plus rapidement possible.
- Bien sûr. Elle ne sent pas bien ? Je l'ai vue redescendre tout à l'heure et...
- Je vous ferai savoir si jamais les compétences d'un clerc sont requises.

Sur ce, le jeune homme verrouilla à nouveau le battant en évitant de faire grincer la poignée, puis retourna au fauteuil.

- Les Dédranes sont aussi jaloux de leurs secrets que les Lévitis. Je n'ai qu'une idée très vague du fonctionnement des liens de sang.

Il se pencha pour essayer les bottes et eut une moue. La qualité du cuir était largement inférieure à l'ancienne paire, mais elles ne devaient pas prendre l'eau trop facilement.

- La seule certitude que j'ai, c'est qu'il vaudrait mieux éviter de puiser encore d'avantage dans ses réserves si c'est possible.

Cette auberge-ci n'avait en effet rien à voir avec celle qu'elles avaient quittée un peu plus d'une heure avant. Elle était beaucoup plus imposante ... et bruyante. Cz n'était pas la coquette petite bâtisse qu'elles avaient laissée derrière mais, en même temps, ce que la plupart des voyageurs rehcrachaient n'était pas tant l'esthétique de l'endroit que le pratique.

Le garçon d'écurie s'approcha pour proposer de rentre les montures, mais les filles refusèrent et demandèrent simplement à ce qu'elles soient attachées et qu'on leur fournisse foin et eau claire. Elle vérifièrent aussi que le cheval blessé du Levitis était dans les écurie. Ensuite elle entrèrent dans la grande salle. Des éclats de voix, de gros rires, des odeurs de rance, de fumée, d'alcool, une chaleur ... très humaine. Berk. Bref, une auberge à fort passage. Les filles se frayèrent un passage jusqu'au comptoir où elles croisèrent la jeune fille aux tâches de rousseur.

- Bonsoir, excusez moi de vous déranger mais nous cherchons deux personnes, un couple, ils ont tous les deux les cheveux blancs, elle a la peau sombre et son teint à lui est plus doré, vous les avez vus ?
- Oh ... ils ne sont donc vraiment pas frère et soeur ...
- En effet non ... je vous confirme. Où se trouvent-ils s'il vous plait ?
- Dans leur chambre, là-haut.
- D'accord. Quelle est la chambre de Mellyna ? La femme ?
- J'ai dit leur chambre, leur chambre à tous les deux. Premier étage, porte numéro 6. Excusez-moi mais on m'appelle.

Elle quitta précipitamment le comptoir pour courir prendre une commande dans la salle. Fanaa restait figée, les oreilles bourdonnantes.

- Et alors ? dit Kyara. Viens, allons-y !

Fanaa leva doucement le regard vers la shalos.

- Je ne pense pas qu'il faille les déranger. Il faut ... il vaut mieux attendre en bas.

Elle se tourna vers la salle pleine, atterrée. Kyara lui posa la main sur l'épaule.

- Le soleil va bientôt se coucher, imagine qu'ils ne redescendent que demain ? Allons-y tout de suite. Nous sommes venues pour ça alors hop !
- Je t'assure Kyara ... ce n'est sûrement pas la peine ...

Faisant fi de la réticence de la Danseuse, la shalos lui prit le bras et l'entraîna à l'étage. Elle chercha la bonne porte.

- Arrête Kyara, il faut leur laisser du temps, on ne peut pas débarquer comme ça, il faut ...

La violoniste toqua au numéro 6.

- Il faut les informer de la situation. conclut-elle.

A cause du bruit, Mellyna soupira doucement et remua dans son sommeil. Le dragonnet lui envoya une pensée rassurante et elle ne se réveilla pas.
Il se tourna vers le lévitis quand il se fut réinstallé :

-Ce serait sage, mais ça va être difficile, elle est têtue... Pour ma part, je vais essayer de me remettre en hibernation pour ne pas trop pomper ses réserves.

Il hésita avant de continuer, le ton était cérémonial et presque suppliant :

-Je peux te la confier en attendant ?

C'est à ce moment qu'ils furent de nouveau interrompus par des bruits frappés à la porte.
Le lézard voleta jusqu'à la dédrane toujours endormie. Il se serra contre elle, essayant de la maintenir au repos, il ne la réveillerait qu'en cas de besoin.

Earl réprima une petite grimace et se disposait à répondre lorsque les coups contre la porte l'en dispensèrent. Etouffant un grognement excédé, il quitta le fauteuil sans prendre la peine de finir de lacer ses nouvelles bottes.
Il ouvrit donc avec une certaine brusquerie, et son "quoi encore ?" mécontent ne se limita au volume sonore d'un murmure que par respect pour le repos de la Dédrane. Ses yeux d'or s'étrécirent en découvrant les intruses.

- Ah, pas trop tôt.

Il sortit dans le couloir et referma la porte dans son dos.

- Eh bien ?

Fanaa baissa les yeux.

- Je suis désolée, je me suis perdue ...

Elle se mordit les lèvres et releva la tête.

- On a bien retrouvé Adwel et elle ne vas pas très bien. Enfin physiquement si mais dans sa tête ça ne va pas. Il faut que je la ramène chez ses parents à Medievir. Et en passant par le Ternaël car elle dit devoir absolument y aller. De toute façon c'est plus ou moins sur la route.

On y était. C'était le moment. Sa poitrine était si serrée ...

- Je ... je suis désolée. Je suis désolée que ça ait tourné ainsi. Mais maintenant je dois m'occuper d'Adwel et ... elle n'est rien pour toi alors je ne peux pas te demander de l'accompagner et risquer de te mettre en danger pour elle. Alors ...

La porte restait fermée alors qu'elle aurait tant voulu que Mellyna apparaisse !

- En plus Mellyna n'a pas envie d'y retourner. J'ai eu une mauvaise idée et j'ai fait une erreur, une de plus. Tu t'es blessé à cause de ça et ... elle poussa un soupir de découragement. Je suis désolée pour tout ça. Alors si vous voulez faire demi-tour, c'est le moment je pense, nous sommes encore proche de Fedoran. Je sais qu'à cause de moi tu as perdu du temps pour faire un stupide aller-retour. Je ne voulais pas que ça se passe comme ça. J'espérais autre chose. Encore une fois je suis sincèrement désolée. Pardon.

- Hé...

Il la fixa avec incrédulité.

- Depuis le début tu t'imagines que je suis votre joyeuse ribambelle uniquement dans l'espoir de participer au sauvetage éventuel de l'amie introuvable de cette fille Tay-truc que je ne connaissais absolument pas avant que tu ne me la colles sous le nez ? Tu te paies ma tête, tu n'as décidément rien saisi, ou est-ce que je dois t'accorder l'excuse de la fièvre, là ?

- Non bien sûr que non. J'espérais que le voyage aurait pu t'apporter ce que tu cherchais. Ou un bout peut-être, une piste. J'espérais que chacun pourrait y trouver quelque chose. J'imaginais ... naïvement ... que ce voyage pouvait être lé réponse à beaucoup de choses. Pas un seul instant je n'ai imaginé qu'il pourrait être une pareilles catastrophe. Je ne me paie pas ta tête, je n'oserais jamais. Et je n'ai pas de fièvre, je me suis fait soigner en route. Elle ajouta précipitamment : Je ne voulais pas perdre de temps ! Je comptais venir vous trouver au plus vite mais elle a insisté.

Elle secoua la tête.

- J'espérais que des liens se tisseraient dans le groupe. Et que peut-être tu verrais que j'ai aussi des qualités.

Elle haussa les épaules et eut un tout petit sourire.

- Mais c'était utopique je crois. Et peut-être un peu égoïste.

Elle laissa passer un court silence.

- Est-ce que ta cheville va mieux ?

- Beaucoup mieux.

Toujours adossé à la porte, les bras croisés, il haussa les épaules.

- Pour quelqu'un d'incroyablement persistant...

Le jeune homme faillit rajouter "dans ses erreurs" mais pinça les lèvres juste à temps.

- Tu renonces bien facilement à causes de circonstances n'ayant pas grand rapport avec le fond du problème. Enfin soit, puisque tu as pris une décision de ton côté...

Il jeta un coup d'oeil vers le pan de ciel qu'on apercevait par une fenêtre ronde au bout du couloir.

- Mellyna se repose et a amplement mérité ses heures de sommeil. Vous pouvez en profiter pour aller manger quelque chose de chaud et de solide en bas. Vous discuterez de la suite avec elle lorsqu'elle se réveillera.

Earl adressa un vague signe de tête à Kyara avant de s'enfermer à nouveau dans la chambre.

C'était la première fois qu'il entendait une femme lui montrer pour ainsi dire la porte. C'est lui qui avait suggéré un deuxième essai avec une approche différente, et à présent elle lui signifiait qu'elle ne le retiendrait pas s'il désirait partir. D'une certaine façon, c'était assez humiliant.

- Eh bien...

Il reprit possession du fauteuil avec un soupir las.

- ... il semblerait qu'il y ait un écueil de mon côté. Ma présence n'est apparemment plus requise dans le groupe des folles amazones. Des idées ?

Kyara avait observé la scène sans intervenir, de toute façon intervenir en quoi ? Elle suivit Fanaa des yeux quand elle s'enfuit, car c'était bien ce qu'elle venait de faire... Elle se pinça la base du nez pour réfléchir

- Elle s’inquiète pour Adweliwen... Elle s’inquiète pour tout le monde en faite...

* petite fleur sauvage * lui murmura une petite voix

La shalos haussa un sourcil en voyant Earl lui fermer la porte au nez pour ainsi dire ! ...Mais non à priori il n'avait rien dit... Elle secoua la tête, depuis qu'elle c'était rapprochée de la forêt quelque chose clochait et elle ne savait pas du tout quoi...
Sur ce elle tourna les talons à son tour, descendit dans la salle commune, commanda deux plats chauds en demandant à ce qu'on la prévienne quand cela sera prêt et qu'elle serait dehors en attendant. Puis elle sortit et alla rejoindre la danseuse

- Fanaa ? l'appela-t-elle en s'asseyant à coté d'elle, j'ai commandé de quoi manger, il vaut mieux qu'on se restaure avant de repartir et puis après on pourra commander des plats à emporter pour le reste de la troupe qu'est ce que tu en pense ? demanda-t-elle d'une voix douce

Fanaa desserra ses mains et regarda longuement le ciel avant de laisser aller sa tête sur l'épaule de la shalos.

- Oui. Tu as raison on va leur rapporter à manger. Ce sera froid mais ils pourront faire réchauffer.

Elle baissa à demi les paupières.

- Mais rien pour moi s'il te plait. Je ne peux rien avaler. Peut-être demain ... peut-être ...

Un silence.

- Elle était belle ta chanson ... tu veux bien me la faire entendre encore ?

- Oui je peux essayer, c'est une chanson que j'ai appris quand je suis venue étudié chez les dédranes... Je ne me rappelle plu de quoi ça parle...

La violoniste se mit à caresser les cheveux de la danseuse, elle se mit à se mordiller la lèvre, nerveuse, c'était rare que la shalos hésite à demander quelque chose pourtant ...

- Dit... Un jour tu danserais pour moi ? ...

Quelque chose n'allait vraiment pas... Pourquoi lui demander ça maintenant ?? Elle ferma les yeux et se concentra sur la chanson. Au début c'était bien sa voix qui sortit de sa bouche puis à nouveau cette voix qu'elle ne reconnut pas... Pourtant... La shalos se sentait apaiser de l'intérieur...