Nolad - plaines

Un sanglot... Elle secoua la tête de gauche a droite... Elle ne voulait pas qu'elle parte... Elle voulait rester la... Et oublier... Mais oublier quoi?

De toute façon, des vêtements secs... alors que tous les sacs récupérés n'étaient que de possibles aquarium... Elle n'aurait pas été étonnée de voir un poisson en sortir.

Ca ferait toujours ça a manger...

Yamana n'était pas loin. Elle approcha un peu plus, laissant Odin qui flairait le sol ou l'air, cherchant a se rassurer.

- Elle est en état de choc... comme à l’hôpital...

La garde du corps déposa le sac de la voleuse et s’accroupit

- Tu devrais vérifier tes affaires. Et faire sécher les vêtements qui sont dedans... Tu veux bien? Laches un peu Fanaa et concentre toi sur tes affaires.

Un nouveau sanglot. Elle lacha un peu son étrinte tout en regardant les yeux verts et brillants de la Dédride. On aurait dit un chat...

Sanglot. Elle lacha Fanaa et commença l'inventaire de son sac.

Kyara revient auprès du groupe en maugréant

- Bon j'ai pas trouvé grand chose, pfff, elle soupira, nous allons devoir faire avec !

Pourtant il aurait fallut beaucoup de bois et beaucoup plus gros que ce qu'elle avait ramené. Elle vit que Fanaa et Mellyna étaient arrivées saines et sauves !

Elle se mit donc à préparer l'emplacement du feu, en faisant attention à bien suivre les conseils pour ne pas mettre en danger le groupe et toute la région. Pas trop prêt de l'eau et pas trop loin non plus. Elle récupéra de quoi allumer le feu dans son sac et si mit à essayer de l'allumer ! Après quelques minutes qui parurent une éternité, la shalos réussit enfin à avoir une flamme assez importante pour réussir un début de feu. Elle ne se précipita pas pour ne pas l'éteindre une nouvelle fois, soufflant un peu sur chaque "branche" ajouté, pour attendit que les flammes s'élèvent bien avant de rajouter de plus "gros" morceaux

- Voilààààààààà !!!

Avec un soupir de contentement, elle présenta ses mains aux flammes

- Venez vous réchauffer, faite juste attention, je ne suis pas sure qu'il tienne au premier mouvement d'air un peu trop important qui se produirait autour de lui. Mais au moins on a un peu de chaleur et surtout de quoi éloigner les bêtes sauvages.

Fanaa observa Adwel avec incrédulité. La voleuse faisait des phrases sans sens et ses gestes,son attitudes étaient étranges, illogiques. Elle semblait ... perdue ? Elle rappelait à Fanaa son état lorsqu'elle avait du mal à parler et que tout était flou. Qu'était-il arrivé à la médiovienne ? Fanaa l'observait, atterrée.

Kyara réapparut et -le ciel soit loué - elle s'occupa de faire une flambée. Grâce à elle il y eut bientôt chaleur et lumière bienvenues dans la froide nuit.

- Merci Kyara. Adwel, laisse tes affaires, rapproche toi du feu, ça va te faire du bien. Taymir aussi. Mellyna, Earl, tout le monde devrait venir.

Elle s'essuya le front, prise d'un accès de fatigue.

- Qui a pu ramasser des affaires ? Qu'est-ce qu'il nous reste ? Moi j'ai pu récupérer mon sac - par les lunes merci - avec les affaires de soins qu'avait préparés Aryllë. Pour ce qui est des couvertures par contre ...

Fanaa se remit debout.

- Je vais ramasser du bois, je reviens.

La shalos avait pris de quoi commencer le feu, mais comme elle l'avait dit, il risquait de ne pas tenir en cas de grand coup de vent alors il fallait préparer une réserve de petit bois. Et Fanaa n'allait pas laisser la musicienne faire tout le travail.
Elle effleura de la main les cheveux bleus d'Adwel et s'éloigna dans la nuit.

Accoudé au dos de son cheval, Earl fit peser un regard scrutateur sur les arrivantes. On pouvait toujours faire semblant de ne pas boîter, ce n'est pas cela qui allait lui donner le change. Enfin, au moins la blessure ne semblait ni assez sérieuse ni assez douloureuse pour entraver réellement les mouvements.
Avec un grognement peu convaincu, le Lévitis se pencha à nouveau sur le jarret frissonnant de sa monture.

- Sage... Bon, ça devrait faire l'affaire jusqu'à demain.

Clopin-clopant, il alla l'attacher au tronc d'un arbre couché non loin du feu de camp improvisé.

- Et ne t'avise pas de rompre tes liens, cette fois.

Non sans quelques grimaces mal réprimées, il revint seul auprès du reste du groupe. La Médiovienne ne semblait finalement pas complètement équilibrée, et certainement pas en état de participer à une expédition plus dangereuse qu'une promenade tranquille dans un parc. Peut-être était-ce en rapport avec l'absent ?
Ce fut avec une belle froideur que le jeune homme se renseigna :
- Vu qu'il manque quelqu'un à l'appel et que personne ne semble vouloir le chercher, c'est que ce n'est plus la peine de s'en inquiéter, je suppose ?

Yamana aida sa protégée à s'approcher des flammes quand Earl arriva avec son cheval clopinant. Il l'attacha et s'approcha du groupe en jetant un regard étrange a Adwel

- Malheureusement, je crois que la où il est, nous ne pourrons pas le retrouver. Il me semble en revanche important que nous fassions un inventaire relativement précis de nos possessions et des montures mais aussi de notre état. Le cheval d'Adwel est mort. il me reste Odon Il leva la tête vers sa cavalière avant de replonger dans de l'herbe qui n'était que des touffes de foin. qui n'a rien. Mes fioles de remèdes ne semblent pas touchées. Elles nous seront utiles pour chez moi. Mes vêtements de rechange sont juste complètement trempés et j'ai encore la totalité de mes armes.

Earl se contenta de hocher la tête.

- Je n'ai pu sauver que mes armes par réflexe, et mes possessions se résument en tout et pour tout aux vêtements que je porte sur moi. Ah, et avec mon cheval, on doit arriver à totaliser les quatre pattes valides. Sinon, excepté un léger excès d'humidité, tout va relativement bien.

Avec précautions, il entreprit de s'asseoir sur le sol pour examiner la botte qui enveloppait sa cheville lésée. Il y avait bien un laçage pour la desserrer, mais il ne descendait pas jusqu'en bas et le cuir détrempé n'allait sûrement pas aider à la retirer.

- En somme cela pourrait être pire.

La dédrane pensait qu'il était ridicule de cacher sa blessure. Surtout que la soigner maintenant éviterait des complications dans le futur. Avant même qu'elle n'ait pu formuler ses objections, la danseuse avait filé vers le groupe.
Mellyna soupira et commença à mettre à sécher le contenu de son sac. Heureusement les herbes à sa ceinture étaient dans des bourses étanches ou il aurait fallu tout jeter.
Ceci fait, elle se rapprocha de Yamana et d'Earl.

-De mon côté deux chevaux valides : ma jument et celui de Taymir. Mes affaires personnelles sont indemnes, herbes sèches et armes prêtes à l'emploi. Hélas je ne me balade jamais avec beaucoup de possessions : je ne pourrai pas compenser les pertes. Pas de blessures de mon côté.

S'agenouillant à côté du lévitis, elle sortit de sa sacoche des ciseaux.

-Faîtes-moi voir cette cheville.

La dédrane entreprit de délasser la botte précautionneusement. Quand elle arriva au bout, elle commença à découper la semelle.

-J'ai des fils de cuir dans mon sac. Ce ne sera pas étanche mais la botte pourra être réutilisée et adaptée au gonflement de votre cheville.

Fanaa revint et déposa tout le petit bois qu'elle avait pu porter en un seul voyage près du feu. Mellyna s'occupait d'Earl qui était à côté de Yamana, laquelle prenait soin d'Adwel, Kyara et Taymir étaient de l'autre côté. Les trois chevaux valides broutaient, de même que le blessé.

La danseuse observa particulièrement Adweliwen, inquiète de son comportement, il faudrait qu'elle demande des détails à Yamana. Mais là, tout de suite, elle n'en avait pas le courage.

Maintenant que tout le monde était rassemblé et plus ou moins en sûreté, du moins il fallait l'espérer, il allait être temps d'essayer de contacter Talisham pour lui apprendre la terrible nouvelle. Fanaa avait reculé l'instant mais elle refusait de s'endormir sans avoir tenté de l'informer. Ca aurait été vraiment lâche.

Sa main monta pour effleurer le pendentif de pierre rouge.

- Je reviens dans quelques instants. lâcha-t-elle très bas.

Elle ramassa "son" sac et prit le chemin du bord de l'eau. Mieux valait s'isoler pour la suite. Qu'il réponde ou pas, elle se devait d'être seule pour tout lui dire. C'était sa faute après tout ...

La danseuse s'assit au bord de l'eau et attendit quelques secondes, le regard vague. Comment annoncer ce genre de chose ?
En attendant de trouver les mots, elle dénoua le gilet de Mellyna qui lui avait servi de garrot, retira ses bottes puis son pantalon pour examiner les marques de griffe. Contrairement à un couteau qui tranche net, une griffe déchire et laboure les tissus. La plaie qui faisait environ 15 cm de longueur n'était même pas droite !
Dépitée, Fanaa s'avança jusqu'à l'eau pour que la température de celle-ci l'anesthésie un peu. Ensuite elle ramassa un bout de bois, l'enroula dans une lanière de tissu découpée de feu son pantalon et le posa sur sa jambe valide. Fouillant dans le sacs elle prit l'aiguille et le fil les plus fins qu'elle put trouver et les prépara. Oh. Désinfecter. Oui. Il y avait de l'alcool prévu à cet effet. Bien.
Plus de lumière n'aurait pas été malvenu car si Fanaa voyait dans la nuit, son regard lui-même ne produisait pas de lumière, ce qui aurait été bien pratique dans la situation présente. Prenant le bâton à la bouche, elle prit une grande inspiration puis enfonça l'aiguille dans sa peau. La souffrance lui fit monter les larmes aux yeux et mordre le bâton. Bon sang, ce que ça faisait mal !
Mais il ne fallait pas se plaindre. Elle pouvait marcher. Ce n'était qu'un petit bobo comme aurait dit Earl. C'était amusant de voir combien le Levitis ressemblait à Fealisèn dans sa dureté. Oui, c'était vrai, leur absence de compassion était très semblable. Pourtant la mère de Fanaa n'était absolument pas de Levitas.
Se concentrer. Faire des points réguliers, rapprochés. Elle savait coudre des vêtements, c'était le même principe. Douleur mise à part. Elle faillit tourner de l'oeil quelques fois et de gouttes de sueur coulèrent dans ses yeux pour gêner sa vision, mais elle devait terminer le travail. Et avoir mal. La compulsion de la punition, malgré que l'entrave psychique associée se soit beaucoup délitée depuis Illymir, était difficile à quitter. Elle avait vécu avec durant si longtemps que c'était devenu un réflexe. Elle avait mal agi, elle devait être punie. Et là, une simple claque ne pouvait suffire.

Elle était si éreintée que si il n'y avait eu la sensation de douleur, Fanaa serait probablement tombée endormie. Mais il fallait terminer la suture, puis envoyer un message à Talisham, retourner au camp, décider des tours de garde et ensuite seulement elle pourrait fermer les yeux.
Mais non ! Non ! Si elle fermait les yeux et qu'il se passait une autre catastrophe ? Non.

*Attends attends. Une seule chose à la fois. D'abord finir de refermer ça et la suite, plus tard.*

C'était comme coudre un vêtement. Elle savait faire, il n'y avait pas de raison. Piquer, traverser, tirer. Piquer, traverser, tirer. Mordre le baillon. Ne pas se plaindre. Elle, au moins, avait encore un corps ...

- Pour ma part, il y a que la couverture qui soit resté de l'autre coté, mon cheval et celui de Fanaa se sont enfuis, j'ai mon violon et le reste est dans mon sac, j'ai passé ma trousse de premier secours à Earl, c'est tout ce que j'ai...

La shalos s'étira, elle avait peu dormi mais cela lui suffisait.

- Je peux rester debout cette nuit, je ne suis pas blessée, juste trempée ! Comme ça il n'y aura qu'une autre personne de debout avec moi, ça laisse plus de personnes qui peuvent dormir plus longtemps...

Fanaa était sur le dos, trempée de sueur et pantelante. Se recoudre soi-même c'était ... une expérience affreuse. Mais nécessaire. Se débrouiller seule. Elle devait savoir se débrouiller toute seule. Il le fallait. Tout son corps était agité de petits tremblements et elle haletait. Mais elle avait réussi. Elle ne s'était pas évanouie avant d'avoir terminé. Et bien que tentée plusieurs fois d'arrêter cette torture, elle s'était forcée à en finir. Il le fallait.
Et surtout, elle avait réussi à ne pas crier. Fanaa se mit à grelotter. Le feu. Elle rejoindrait bientôt le feu. Dès qu'elle arriverait à se mettre debout. Earl était blessé mais Mellyna avait promis que ce n'était pas trop grave et elle s'occupait de lui. Quant à Adwel ... sa petite maman oiseau bleu semblait un petit oiseau un peu perdu et Fanaa s'en voulait de ne pas avoir remarqué cela avant de l'entraîner ainsi à l'aventure. Elle cacha son visage dans ses mains.

*Non. Je ne vais quand même pas pleurer maintenant !*

C'était le moment pour essayer de contacter l'elven. Elle avait déjà trop attendu. Il devait savoir. Elle se mit à regarder le ciel et ses mains descendirent serrer le pendentif.

- Talisham, Talisham, Talisham. Il s'est passé ... quelque chose de terrible cette nuit. Monsieur Feyn est ... mort une seconde fois. Et ton corps ... il a été piétiné et il a disparu. Je l'ai cherché, je l'ai cherché Talisham mais il n'y avait plus rien. Mellyna a dit qu'une lumière l'avait emporté. Je n'ai rien vu. Je suis tellement désolée Talisham, tu ne vas pas pourvoir revenir ... à cause de moi ...

Sa vue se brouilla et ses joues s’inondèrent de larmes. Prononcer les mots tout haut c'était accepter ce qu'ils signifiaient. Que Feyn et peut-être même Talisham étaient en route pour la quatrième lune ...

- Nous chercherons les chevaux manquants lorsqu'il fera jour, en espérant qu'ils ne se soient pas fait surprendre par un prédateur dégoûté de la viande de moo d'ici là.

Earl commença à s'extraire de son manteau. Le vêtement humide semblait peser une tonne et une des manches s'était déchirée sur toute sa longueur lorsqu'il avait roulé sur le sol. Ses habits avaient décidément une fâcheuse tendance à finir en pièces.
Sa chemise lui collait au torse, et d'ailleurs...
Le jeune homme jeta un coup d'oeil circulaire sur les autres personnes présentes et décida soudain de se concentrer avec toute l'intensité imaginable sur le jeu des ciseaux de Mellyna. Las, juste derrière les ciseaux en question, la vue était tout aussi révélatrice.
Embarrassé, il fit mine de s'absorber dans la contemplation du ciel à présent bas et noir d'encre.

- J-il risque de pleuvoir un peu si le vent ne tourne pas d'ici une heure ou deux. Enfin vu que tout le monde est déjà... hum... détrempé...

Mellyna leva les yeux vers le lévitis, intriguée par son attitude gênée. Ne comprenant pas la cause de son désarroi, elle se reconcentra sur sa tache.
Elle retira ce qu'il restait de la botte, palpa les os de la cheville, les ligaments.

-Heureusement rien n'est cassé, commenta-t-elle dans sa barbe.

La dédrane appliqua des herbes antalgiques, préleva des bandes propres de la trousse de Kyara qu'elle noua solidement.

-Voila ça devrait tenir pour marcher, bien entendu le repos serait préférable... Fit-elle avec un haussement d'épaule d'impuissance.

Elle recousit la botte, assez serrée pour maintenir la cheville, mais pas trop pour ne pas couper la circulation quand la cheville ne manquerait pas de gonfler.

-J'ai une toile imperméabilisée dans mon sac, si on l'attache ça devrait nous tenir au sec.
Elle leva la tête et s'adressa à la ronde.
Mesdemoiselles ? Quelqu'un a-t-elle de la toile dans ses affaires ? Ou de quoi l'attacher solidement ? Earl nous prévoit le retour de la pluie dans les heures à venir...

Le chagrin de la perte était normal, mais peut-être valait-il mieux se concentrer sur les personnes qui étaient encore présentes. Fanaa aurait bien voulu passer sa nuit à pleurer dans l'espoir que cela la soulage un peu, mais l'idée lui semblai égoïste. Aussi elle s'essuya les yeux, alla au bord de l'étang pour se passer de l'eau glacée sur le visage. De son sabre elle se fit une petite coupure à l'intérieur de la cuisse droite puis s'occupa de bander bien serré sa cuisse et le haut de ses bras. Cette partie ne fut pas aisée mais en utilisant ses dents, elle réussit à se débrouiller.

Reprenant le sac, elle rejoignit le groupe. Elle voulait sourire, mais les muscles de son visage ne répondaient pas à ses sollicitations. La Danseuse restait debout, nerveuse et très désireuse de trouver de quoi s'occuper. Tout le monde était éveillé et nul ne semblait près de dormir. Elle-même se sentait pourtant épuisée comme jamais. C'était aussi pourquoi elle restait debout. Si elle s'asseyait, elle risquait de s'écrouler endormie, or il y avait sûrement d'autres choses à faire.

- Ca va le feu ? Vos vêtements sèchent bien ? Le petit bois brûle vite, je devrais peut-être retourner en chercher ? Earl, tu as mal ? Personne d'autre n'a été blessé, hein ? Le petit bois brûle vite, je devrais peut-être retourner en chercher ?

Earl répondit par un grognement qui n'engageait à rien.

- T'ai-je déjà fait remarquer que se rafistoler soi-même est profondément stupide lorsqu'il y a quelqu'un en mesure de faire les choses plus proprement à disposition ?

Il considéra sa botte puis hocha la tête à l'intention de Mellyna. Il croisa mentalement les doigts en espérant qu'il y aurait un cordonnier dans le prochain village où ils feraient étape : la perspective de se promener dans des marais avec des chaussures qui prennent l'eau n'avait rien de très affriolant.

Le coin de ses lèvres se releva, étrangement la remarqua grondante du Levitis la détendait un peu.

- Non, nous n'avions encore jamais abordé ce sujet. Mais ce n'est rien de plus qu'un "genou écorché", un petit bobo de rien du tout. Alors autant que je m'en dépatouille sans déranger autour de moi.

Elle croisa les bras, se pinça la base du nez et ferma les yeux. Des petites lumières dansaient sous ses paupières closes. Elle fallait qu'elle fasse quelque chose, qu'elle s'occupe les mains car sa nervosité croissante lui faisait mal à la tête.

- Du bois. Je retourne en chercher et je reviens.

Fanaa tourna les talons. S'occuper les mains. S'occuper l'esprit. S'occuper, s'occuper, s'occuper.

- Si c'était juste "un genou écorché", moi je suis un moine...

Earl soupira avant de jeter un nouveau coup d'oeil vers le ciel.

- Ca m'étonnerait qu'il pleuve beaucoup, si jamais il pleut. Le plus gênant serait encore le ruissellement de l'eau sur la terre sèche qui risquerait de noyer le foyer.

Fanaa ne restait pas en place, elle voulait donner le change mais quelque chose dans son attitude disait à Kyara, que tout ce qu'elle voulait c'était dormir...
La violoniste observa la danseuse d'un peu plus prêt, elle essayait de cacher au maximum qu'elle était blessée mais la violoniste le sentait. Enfin c'était un peu plus compliquer que ça... Il faisait nuit, et les ombres en profitaient pour ne faire qu'une, c'est pendant la nuit que les pouvoirs de Kyara étaient au maximum... Elle lui arrivait de ressentir des choses qui passaient totalement à coté des autres, certainement comme Adweliwen avec l'eau...

La musicienne secoua la tête :

- En creusant, une espèce de douve autour du foyer ça pourrait empêcher qu'il se "noit" ? ou peut être en mettant des pierres en dessous pour le surélever et permettre à l'eau de s'écouler en dessous ?

La shalos n'avait pas l'habitude de se genre de situation, alors elle proposait sans vraiment savoir si c'était réalisable ou pas. En attendant de connaitre la réponse, elle pliait et dépliait ses doigts, elle commençait à se réchauffer, ses vêtements à sécher mais elle avait l'impression d'être encore engourdie par l'eau froide.

- Une petite butte de terre en regard à la pente et une gouttière creusée de chaque côté pour contribuer à dévier l'eau devraient suffire. Le bois est résineux, il brûle vite mais il continue aussi à brûler sous une pluie modérée. Et si tout cela ne suffit pas et que le feu se noie, c'est qu'il tombera des trombes d'eau et que personne ne pourra rien y faire.

Earl secoua un peu son manteau qui fumait en séchant.

- Quoi qu'il en soit je suggère que nous tâchions de profiter des quelques heures qui nous restent avant le jour pour prendre un peu de repos. Et il serait bien que même ceux... enfin celles qui n'ont pas envie de dormir se forcent malgré tout à fermer l'oeil. Quand on n'est pas de quart, faire en sorte d'être frais et dispo pour la suite est aussi un devoir.

Presque par inadvertance, il adoptait un ton et un vocabulaire de commandement, mais il n'avait pas affaire à des soldats. La moitié étaient des donzelles qui ne semblaient pas vraiment dans état mental de supporter un quelconque voyage.
Le jeune homme fit un effort visible pour adoucir ses paroles, avec un succès assez relatif.

- Et tant que j'y pense... si on pouvait éviter d'avoir en permanence une ou deux personnes qui s'en vont bouder ou se mettre en transe dans leur coin le plus loin possible du groupe, ce serait aussi une bonne chose. On n'aura pas à se demander si elles se sont fait attaquer et s'il faut aller les chercher ou non. Ce soir nous rappelle qu'on n'a pas besoin de chercher le danger pour qu'il nous trouve. Alors essayons de ne pas en rajouter nous-même, pour le bien de toute le monde. Je ne doute pas que chacune... hum... d'entre vous soit en mesure de se débrouiller seule, mais là il s'agit d'un groupe. C'est différent.

Il se passa une main lasse sur la figure avant de se retourner vers Kyara.

- Je me serais bien proposé pour la première veille aussi, mais... Pour être franc, je doute de pouvoir tenir réellement éveillé ne serait-ce qu'une heure de plus. Si jamais vous avez besoin d'un relais d'ici deux ou trois heures, en revanche...

*Dormir!*

Enfin quelqu'un avait donné l'autorisation tant attendue. Par les lunes, merci !

- En ramassant le bois j'ai fait le tour du périmètre et les charognards ne font pas mine de s'approcher. Ils préfèrent festoyer de l'autre côté. Donc on devrait être tranquille.

Avec Kyara elle s'occupa du feu en suivant les conseils du Levitis et s'autorisa enfin à s'asseoir. Ensuite tout fut terminé. Elle effleura le bras d'Adwel et se sentit tomber sur le côté. Dans son sommeil elle regretta la peau de tora mais de toute façon elle n'aurait pas eu assez de temps pour le dépecer et tanner le cuir. Pas en repartant déjà. Elle se roula en boule pour garder sa chaleur et ne bougea plus, espérant que le soleil prendrait son temps pour se lever, la laissant se reposer le plus possible.

Mellyna s'était affairée de son côté. Elle amena sa toile de tente et la mit sommairement en place au-dessus de Fanaa et d'Adwel. Elle bloqua deux coins de la tente avec des pieux et attacha les deux autres avec des branches pour qu'ils soient surélevés. Cela les protégeraient de la pluie et de l'humidité, du moins si elles restaient recroquevillées. Si on était allongé, la tente s'arrêtait au niveau des cuisses.

-Vous pouvez dormir Earl, je vais prendre les premières heures de garde avec Kyara. Fit-elle quand elle fut satisfaite de la solidité de l'édifice.

La dédrane vint s'assoir à côté de la shalos, le feu réchauffait agréablement son dos et ses yeux se fixèrent sur les ténèbres pour y déceler du mouvement.
Elle finit par sortir ses lames de leur fourreau et entreprit de les polir sans perdre pour autant sa concentration. Avec les années de pratique, le mouvement était devenu un automatisme et ne requérait pas une grande attention de sa part.
Le feu émettait des crépitements par moment, la quiétude de la nuit n'était troublée, de temps à autre, que par des grognements de charognards qui se disputaient les carcasses de moos.

Après un dernier coup d'oeil circulaire sur les plaines embrumées, s'aidant d'un de ses sabres comme d'une canne, Earl boitilla toujours aussi dignement jusqu'au lac pour procéder à de sommaires ablutions matinales. Lorsqu'il revint d'un détour du côté de son cheval, il gardait un air un peu froissé et le teint grisâtre mais semblait à part cela plutôt en forme.

- Il faudra qu'on s'arrange pour les montures restantes, marmonna-t-il en s'asseyant lourdement sur un bout de sol déjà bien séché par le feu. D'une certaine façon, c'est aussi bien de ne plus avoir autant de bagages qu'au départ, ça fera toujours une charge en moins pour eux.

Fanaa ouvrit les yeux et resta sans bouger, le temps de remettre ses idées en place. Où était-elle ? Les plaines du Nolda. Qui était à côté d'elle ? Adwel. Que s'était-il passé ? Feyn ... les moos ...
Elle referma les paupières, comme si cela pouvait changer les choses. Non. Ca ne pouvait pas. Avec un soupir elle se redressa et se glissa hors de l'abri. Elle se sentait ankylosée et avait mal un peu partout. Dormir sur un sol froid n'était pas ce qu'il y avait de mieux.
Encore embrumée, elle se dirigea au bord de l'eau. La danseuse ne se sentait pas très bien, lourde, barbouillée peut-être ?
Après une toilette, elle commença à échauffer les muscles et faire ses exercices mais sa cuisse blessée tirait sévèrement. C'était peut-être encore un peu tôt ? En se relevant elle se sentit son coeur se soulever et n'eut que quelques secondes pour se camoufler derrière des roseaux.
Beuh ... ce que ça pouvait être désagréable ...
Une fois son estomac vide (vu le peu qu'il restait de la veille, ce fut rapide) elle retourna au bord de l'eau se rincer la bouche et le visage. Une fois calmée, elle marcha jusqu'au foyer et s'assit.

- Bonjour.

Elle refit ses nattes.

- Est-ce que ça vaut la peine de repasser à l'ancien campement au cas où il resterait des choses récupérables ? Ou est-ce qu'il vaut mieux directement partir à la poursuite des chevaux ? Remarque, le mien n'a même pas de nom et ils ne nous connaissent pas. Ils sont peut-être retournés sur leurs pas vers Fedoran ...

Elle secoua la tête.

- Melly ? Tu as réussi à garder des réserves de nourriture ? Elle semblait surprise. Beaucoup ?

- Tout le monde ne pourra pas partir battre la campagne à la recherche des chevaux, de toute façon ; ce n'est pas le genre de recherche qui se fait à pied.

Earl leva un peu sa botte décousue pour vider l'eau qui avait profité de sa toilette pour s'infiltrer à l'intérieur.

- Pendant ce temps, les personnes restantes pourront toujours retourner de l'autre côté du lac. Le moindre objet intact pourrait servir.

Il jeta un coup d'oeil vers l'étendue d'eau empanachée de spectres de brume.

- Surtout depuis que celui qui devait, d'après ce que j'ai pu comprendre, récupérer le reste de l'équipement à un des villages-étape a disparu corps et biens. Pas sûr qu'on puisse facilement obtenir le nécessaire par nous-même si jamais les personnes qui gardent les bagages font des difficultés.