Lac Ryma

"Lyrev..." - Lâcha Lynn dans un souffle.
La voix du magnifique jeune homme avait conservé quelque chose du ronronnement. Chaude et vibrante, richement timbrée, elle évoluait sur un rythme singulier, tout à la fois entrainant, et apaisant.
La levitis abaissa, sur ses yeux inutiles, le rideau de ses paupières, laissant les mots de Lyrev peindre à petites touches leur tableau extraordinaire sur la toile, réceptive, de son imaginaire.
Un décor enchanteur, une délicieuse compagnie... La scène avait tout du songe dont on souhaite que jamais il ne s'arrête.
En cet instant, la jeune femme se trouvait loin, très loin…
Loin des cauchemars qui peuplaient habituellement ses nuits, des réminiscences qui lui gâchaient perpétuellement la vie. Pour la première fois de son existence, elle se laissa entièrement aller, en toute confiance.
Ses doigts accentuèrent leur pression sur les mains de celui qui naguère avait été félin.
La première larme roula le long de sa joue.
De nombreuses autres suivirent.

Il est de ces règles que tout un chacun connait, des règles innées, des phrases toutes faites que l'on a dans un coin de la tête mais qui ne se comprennent que dans certaines situations précises.

Un exemple ?

"On ne fait pas pleurer les filles."

Lyrev avait beau être plus un chat qu'un humain, cette règle intemporelle se fit entendre dans sa tête dès les premières larmes de Lynn. Il eut une tension infime de tout son corps, eut un instant l'idée de s'éloigner de cette fille, mortifié de la rendre si malheureuse. Il savait que les pleurs étaient accompagnés d'une tristesse qui déchirait le cœur, qui faisait souffrir et mettait mal à l'aise. Il l'avait vécu à peine quelques minutes auparavant. Il songea donc à s'éloigner ... mais Lynn tenait ses mains autant qu'il tenait les siennes, et il ne voulait pas rompre l'étreinte de force, ne pas être brusque.
Alors en lieu et place de partir, il resta et s'ouvrit à ce que Lynn ressentait et il perçut que ces larmes-ci n'étaient pas tristes. Un barrage se rompait en Lynn, la libérait, et il sentit que c'était bien.
Un de ses bras serra Lynn plus fort contre lui, qu'il sente qu'il était vraiment présent, qu'il la soutenait et qu'elle pouvait se laisser aller, elle ne tomberait pas. Il la fit légèrement pivoter de côté puis son autre main se dégagea en douceur pour venir se poser sur la joue de la jeune femme. Il fit tourner un peu plus son visage et l'embrassa juste au-dessous de l'un de ses yeux tandis que de son pouce il essuyait les larmes de l'autre œil.

Il releva la tête et sourit. L'on pouvait lire sur son visage qu'il était tout de même penaud d'avoir provoqué ses pleurs.

- Quels jolis yeux ! Et dire que toute cette eau les empêche de resplendir comme ils le devraient. Quel dommage ... Tu es toujours belle Lynn, mais quand tu souris, c'est tout Medievir qui devient tout à coup plus joli ! Le dragon doit sentir qu'il manque un éclat particulier à sa ville. Si tu continues, il va se réveiller pour venir lui-même te consoler puisque je ne suis pas assez doué pour ça ...

Lynn se sentit transportée, chavirée. Des années d'existence avait fait d'elle ce qu'elle était. Quelque instants venaient de tout bousculer. Cela ne pouvait être réel... Pourtant...
*C'est un homme!* - s'indigna sa raison.
Elle tourna la tête pour contempler le visage de Lyrev. Ce visage harmonieux, magnifique, rayonnant...
Son coeur battait la chamade. Son souffle échappa à tout contrôle. L'une de ses mains, de son propre chef semblait-il, alla se placer derrière la nuque du jeune homme. Ses cheveux étaient soyeux, si agréables au toucher... Elle frissonna.
*C'est un chat!* - la raison essayait encore de se faire entendre.
Le regard de la levitis plongea dans les yeux de son vis-à-vis, et cette fois, elle s'y noya tout à fait. Le monde alentour avait complètement disparu. Il ne restait que lui...
*C'est un ange...* - la raison avait battu en retraite.
S'abandonnant complètement à l'impulsion qui la tenait, elle s'éleva à Sa rencontre.

"Merci..."

Et ses lèvres se posèrent sur celles de Lyrev.

Le contact autant que le geste surpris Lyrev. Autant par son imprévu que par l'enchaînement logique des choses. Oui, ce geste était surprenant, mais en même temps il se coulait naturellement à la suite du câlin, de la tendresse, de la proximité qu'ils partageaient.

Le baiser de Lynn était tendre, offert, empli de reconnaissance mais aussi, interrogatif. Lynn s'ouvrait à de nouvelles sensations, elle demandait à Lyrev de les partager avec elle, de l'accepter, de lui en donner en retour. Son baiser espérait qu'il allait y répondre, mais la main qu'elle avait passée derrière sa nuque restait là comme une sécurité, une autre demande "ne me refuse pas s'il te plait..."

Lyrev qui accepta, reçut, donna, goûta, découvrit. Alors c'était cela un baiser ? C'était cela que s'échangeaient les humains pour se signifier qu'ils souhaitaient partager, vivre ensemble un instant - variant de quelques secondes à des jours, des semaines, des mois - plus ou moins long ? Il le savait. Théoriquement. Il en avait conscience, mais le vivre ... il sentit son cœur s'emballer. C'était différent, étrange et très agréable.

La main qu'il avait laissée sur la joue de Lynn remonta vers la tempe et alla se glisser dans les cheveux châtains. L'instant se prolongea ... puis soudain, le jeune homme sembla se rappeler qu'il fallait respirer et sépara ses lèvres de celles de la jeune femme pour reprendre une grande goulée d'air. Il regarda la levitis et plongea nicher son museau au creux de son épaule et de son cou. Sous les cheveux.
Toutes ces émotions, toutes ces sensations surtout qui l'assaillaient d'un coup! C'était bon, c'était fou; il se sentait des papillons dans le ventre, des fourmis dans les membres et un léger tournis.

- Tu as bon goût Lynn ... et ton parfum ...

Elle put sentir un souffle chaud la chatouiller sur la délicate peau de son cou.

- Ton parfum ... hmmm ...

Il la humait avec plaisir, c'était différent de ce qu'il captait avec son nez de chat mais cela fleurait délicieusement en humain aussi.
Dans son creux tout tiède et tout doux, dans son petit cocon, il essayait de calmer les battements affolés de son grand cœur, d'analyser toutes ces nouveautés, de les comprendre et de ne pas perdre complètement la tête mais plutôt de remettre ses idées en place. Il ferma les yeux et sourit.

C'était bon ... perturbant, mais délicieusement bon.

- hey ! s'exclama-t-il.

Il releva la tête et ses yeux pétillaient de nouveau alors qu'il regardait Lynn. Elle voulait jouer ! Chic ! Il se sentit plus chat à cette idée. S'amuser c'était chouette. Et puis ce jeu d'humain ressemblait à pas mal de jeux animaux. Il fallait se titiller, se chatouiller, se mordiller, se donner des coups de pattes mais sans les griffes. Facile !

Il eut un sourire mutin, puis sans prévenir, pinça le bout du nez de Lynn avec ses lèvres, le relâcha et, à quatre pattes, il fit un bond en arrière et se baissa sur ses bras, dans une position de félin joueur aux aguets, prêt à bondir. Son visage était éclairé par un sourire amusé.

- Gagné !

Lynn fut prise au dépourvu, et l’espace d’un instant, ne sut même plus quoi penser. Puis son regard retrouva Lyrev et elle ne put s’empêcher d’éclater de rire.

« Ah, tu veux jouer ? Tu vas voir ! »

La levitis commença par ôter ses chaussures, puis se leva et se cala sur ses appuis. C’était bon de sentir l’herbe sous ses pieds.
Elle observa un moment son « adversaire » rieur. Souple, rapide, réactif… Forcément, c’était un chat ! Elle avait tout de même deux légers avantages sur l’homme-félin (enfin, avantages… des éléments qui venaient atténuer un peu la supériorité naturelle de son vis-à-vis). D’abord, elle ne voyait que lui, aucun risque pour qu’elle soit distraite par un quelconque mouvement… il fallait juste espérer qu’il n’y ait pas d’obstacle, et que le sol ne soit pas trop inégal. Ensuite, elle avait beaucoup plus l’habitude de son corps humain…
*Non, ce n’est pas encore assez, il va me filer entre les doigts, forcément… À moins que…*
Ce n’était peut-être qu’un jeu mais Lynn avait toujours eu l’esprit de compétition. Et puis… elle devait bien le reconnaître… elle avait envie d’impressionner.
*C’est parti !*
La jeune femme bondit en avant, tendant les bras pour tenter d’attraper Lyrev. Elle le savait largement assez vif pour esquiver, le tout était de savoir s’il en aurait envie, et si oui, de quel côté il allait partir… Elle attendit d’être quasiment certaine avant d’agir. Se laissant presque tomber à plat ventre jusqu’au sol, elle se fit soudain propulser par une bourrasque d’elixia de vent. Elle voulait saisir Lyrev à bras-le-corps et le mettre au sol, sur le dos…

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Eyrol avait filé des épaules de Lynn dès qu’il avait senti que sa présence ne serait peut-être pas souhaitable. Sa Maman et son Copain Poilu (qui avait grandi, perdu presque tous ses poils, et qui s’était verticalisé, mais qui conservait la même odeur) étaient occupés d’une façon qu’il ne comprenait pas trop, mais qui lui semblait réclamer un peu d’intimité. Le Phéazarix avait donc commencé par faire un peu le tour de l’endroit, histoire de bien se repérer. Puis il avait entrepris de courir après les papillons, ce qui l’avait bien occupé.
Soudain, il y eut une série de mouvements. Eyrol se tourna vers les deux humains.
Voilà qu’ils jouaient à un jeu qu’il connaissait. Dommage qu’ils fussent si grands, le petit animal aurait bien participé lui aussi. Tant pis, il se contenterait de regarder…

Lyrev attendait, prêt à bondir, guettant son adversaire pour étudier sa technique. Il ne devait pas se laisser attraper. Il la vit se préparer et perçu le mouvement dans l'air, l'utilisation de l'elixia. Il pouvait se tromper sur la trajectoire qu'elle emprunterait mais fait une certaine estimation et s'en tint là.

Elle fonça vers lui.

Il bondit pour l'esquiver.

*N'oublie pas.*

La voix résonna en lui et il hésita. Il ressentit quelque chose. Rapidement. De la peur ?
L'hésitation avait été de trop. Il ne bondit pas assez haut, revint au sol, à la merci de la Levitis. Pour éviter de lui faire mal en se dégageant, il la laissa le plaquer au sol.
Il leva une main et passa une mèche de Lynn derrière son oreille.

- Tu es forte, Lynn.

Elle n'en revenait pas. La manœuvre avait marché.
Elle s'était plus ou moins attendue à manquer le jeune homme d'un cheveu et à se retrouver étalée dans l'herbe. Au lieu de ça, elle était à califourchon sur Lyrev. Qui lui faisait un compliment en plus.
*Oh nooon.*
Lynn n'aurait jamais pensé que cela put lui arriver aussi facilement... Et pourtant, elle rougit jusqu'aux oreilles lorsqu'il l'effleura.
*Mais qu'est-ce qui m'arrive?*
Elle tourna légèrement la tête et, d'un geste vif de la main, dissimula son visage derrière ses cheveux défaits.
*Allez, répond-lui quelque chose!*

"Mais non voyons, je ne suis pas si forte que ça. J'ai eu un coup de chance. À moins que la chance n'ait reçu un coup de pouce, hum...? "

*Aoutch, que c'est maladroit... bon tant pis, c'est dit. Et ensuite?*

"En tout cas..."

Elle se pencha vivement et déposa une succession de baisers rapides sur le front, le bout du nez, les lèvres de Lyrev.

"Gagné!"

Une pluie de bisoux. Petits. Nombreux. Rapides. Papillonnant. Partout.

Ce n'était pas comme un baiser, et Lyrev ne comprenait pas le sens de tout cela. Il ne savait pas, il n'était pas sûr. La gamme des émotions humaine était bien plus étendue et nuancée qu'il le pensait. Il aurait du travail si il souhaitait en démêler les mystères.

Il souriait toujours mais ne rendit pas les bisoux. Il n'était pas sûr de devoir le faire. Le jeu n'aurait pas dû se passer ainsi. Pas tout à fait.

Le jeune homme redressa le buste et posa ses mains sur les joues de Lynn.

- Oui tu as gagné, Lynn. souffla-t-il en frottant le bout de son nez contre le sien.

Il fit doucement passer les mèches folles de Lynn derrière ses oreilles.

- Ne te cache pas Lynn, tu es belle.

Elle pouvait sentir son souffle, il lui sourit de nouveaux et Lynn pouvait voir sa propre image se refléter dans les joyaux qui servaient d'yeux à son compagnon.

Lynn frissonna au contact du jeune homme. Elle se sentait toute... toute... son esprit chercha un mot approprié à mettre sur la sensation. N'en trouva pas. Laissa tomber. Il avait mieux à faire.
Du bout d'un doigt, elle suivit la ligne de mâchoire de Lyrev, depuis l'angle, juste sous le lobe de l'oreille, jusqu'à la pointe du menton.

"Alors si j'ai gagné..."

Elle posa ses paumes sur les épaules du jeune homme et poussa de tout son poids pour l'obliger à s'allonger.

"J'ai droit à une récompense non?"

Cette fois, le baiser qu'elle lui donna n'avait rien de timide...

Ce baiser de Lynn était différent du premier. Plus chaud, plus passionné, plus dévorant. Ce baiser-là avait du caractère et savait ce qu'il voulait. Ce baiser ressemblait à la facette de Lynn qu'elle laissait voir le plus souvent.

Lyrev goûtait, ressentait, analysait et observait.

Le contact était agréable mais en même temps ... il provoquait quelque chose. Autre chose. Quelque chose qui faisait mine de vouloir l'envahir tout entier. De lui annihiler le cerveau. De déferler et prendre la place de tout le reste. Ca semblait tellement puissant, tellement fort qu'il ignorait si il saurait y résister.
Et comme il ignorait aussi si c'était bon ou mauvais, il préférait ne pas prendre de risque et tenter de retenir la vague voire même, de la faire reculer.
Mais il était indubitable que le contact de Lynn ne l'aidait en rien dans sa décision. Au contraire, la chaleur de sa passion faisait dangereusement fondre les barrières de sécurité du jeune homme.

Mais la repousser ? Impensable.

Il aimait beaucoup Lynn. Et elle avait bon goût. Et elle était belle. Et gentille. Il l'aimait beaucoup. Il ne pouvait pas la repousser. Impossible.

Lorsque les lèvre de la belle se détachèrent de lui et qu'il put respirer (son délicieux parfum entre autres) il lui sourit et passa le bout de ses doigts sur le joue douce comme une pêche de la jeune femme. Agréable courbe.

- Tes cheveux me chatouillent c'est doux. Tu as vu Lynn, avec tes cheveux qui cachent le reste, on dirait qu'il n'y a que nous ...

Il se mordit la lèvre et eut une expression coupable en songeant à l'énormité qu'il venait juste de dire.

- Excuse moi Lynn. Je ne voulais pas te blesser.

La peine qui passa alors dans ses yeux corroborait la sincérité de ses paroles. Il soupira et fit mine de se redresser, penaud.

*"On dirait qu'il n'y a que nous". Que veut-il dire...? Serait-ce que...?
Oh, mais... il a dit "nous"?*

Une nouvelle fois, elle s'empourpra.
Tout cela allait vite, si vite...

*Et alors? Maintenant, c'est maintenant. C'est une affaire de moment, pas de vitesse.*

Lyrev a écrit:

- Excuse moi Lynn. Je ne voulais pas te blesser.

La blesser? Pourquoi l'aurait-il blessée? Elle ne voyait pas. Mais bah, s'il voulait qu'elle l'excuse...

"Je pense que je peux te pardonner, grand bêta..."

Elle le repoussa de nouveau en arrière.

"Mais il va falloir que tu te montres convainquant dans l'argumentation."

*Il n'y a que nous...*

Elle se saisit d'un des avant-bras du jeune homme et guida la main qui le terminait pour qu'elle vienne se poser sur sa hanche, tandis que sa propre main droite s'aventurait sous l'élégante chemise que portait Lyrev.
On prétendait communément qu'un sortilège devait être prononcé trois fois avant d'être vraiment effectif.
Pour la troisième fois, elle l'embrassa...

Ce baiser là le cloua au sol peut être plus que la poigne de Lynn. Dans sa tête, les sensations prenaient de plus en plus le pas sur la réflexion. Il ne fallait pas dépasser une certaine limite auquel cas le jeune homme ne répondrait plus de rien.
S'arrêter était la meilleure des choses à faire. Il le savait. Il le savait mais quant à passer à l'action, c'était une autre paire de manche. Comment lui dire en douceur qu'il se sentait se perdre, qu'elle lui faisait un effet ... monstre ?

Comme cette fois elle ne semblait pas décidée à dessouder ses lèvres des siennes, il déplaça sa main de la taille de la jeune femme et tenta gauchement de la diriger vers le visage de la levitis.
Sauf que sur le chemin se trouvait un sein. Et pas n'importe quel sein. Rond, magnifique, tiède, d'un contact doux même au travers du tissu. Ce contact l'électrisa. Il ne l'avait effleuré que du dos de la main mais des informations diverses et variées, des sensations, des couleurs avaient fusé à travers sa tête.
Sa tête qui fourmillait plus fort.
Et il ne savait plus ce qui était bien ou pas. Dans sa tête tout était brouillé et son corps régissait. Il avait chaud.

Lyrev se redressa d'un seul coup mais eut le réflexe d'entourer Lynn de ses bras afin de ne pas la faire tomber.

- Lynn tu as dit ...

Son grand cœur battait très vite, aussi affolé que lui.

- ... je ne veux pas faire de bêtise et te mettre en colère ! je ne sais même pas si ce que je fais est bien ou mal !

Ses yeux. Ses beaux grands yeux brillants qui caressaient Lynn et en même temps l'interrogeaient. Qui montraient à la jeune femme qu'il était un peu (doux euphémisme) perdu.

L'enthousiasme de Lynn fut momentanément douché. Elle s'était jusque là laissée porter par l'élan, sans réfléchir à ce qu'elle faisait.
Qualifier le jeune homme dans les bras duquel elle se trouvait "d'attirant", ç'aurait été comme dire que les poissons étaient par nature "un peu aquatiques". Et son comportement avait tout pour plaire.
En plus, elle avait eu l'impression qu'il réagissait plutôt favorablement, alors...
Mais maintenant, il temporisait. Il doutait.
Tout comme l'euphorie, le doute s'avéra contagieux.
Elle avait tout tenu pour acquis sans même s'interroger sur ce que Lyrev pouvait bien ressentir...
Elle avait un peu honte d'elle-même à présent.


"Désolée."

Elle s'obligea à reprendre le contrôle d'elle-même. Sentir le torse du jeune homme sous ses doigts ne l'aidait pas vraiment, mais elle laissa sa main là où elle se trouvait. Juste au cas où.

"Je pensais que... que tu savais ce que tu faisais. - *Menteuse!*- Enfin, non. Je l'espérais plutôt. J'aurais dû... - elle se mordilla la lèvre inférieure. - Pardon, je n'ai pensé qu'à moi."

Lynn ne put s'empêcher de caresser le visage de Lyrev.

"Tu es si... parfait."

Il gardait la jeune femme sur ses genoux, il la gardait dans ses bras.

Il secoua la tête et eut un léger sourire un peu peiné.

- Lynn, si j'étais parfait tu ne t'excuserais pas pour une raison que j'ignore. Si j'étais parfait, tu ne m'aurais pas crié dessus tout à l'heure alors que j'étais si heureux d'être avec toi. Et alors je me laisserais porter maintenant, je me laisserais aller sans poser de question car je t'aime beaucoup Lynn. Et être avec toi me rend heureux.
Seulement je ne suis pas parfait, non. Tu m'as prouvé que je pouvais mal faire. Que je pouvais te mettre en colère. Et je ne veux pas te voir en colère Lynn. Quand tu es bien, ton visage est si beau qu'il fait passer le lac Ryma pour un point d'eau parmi tant d'autres. Et alors je me sens heureux de te voir ainsi. Mais quand tu es mal ou que tu te fâches, alors ça me fait mal. Je me sens tellement mal à l'aise de te décevoir, d'être si ... maladroit.
C'est moi qui te demande pardon Lynn. D'être inconvenant et cavalier. Que tu aies déjà des reproches à me faire.

Lynn avait un peu de mal à suivre. En une seule tirade le jeune homme avait refusé toute louange, pris sur lui tous les torts qu'il fut possible d'imaginer sur le moment, et retourné dans la foulée quelques compliments bien tournés... pour finir par lui-même s'excuser... de quoi au juste? Il ne se rendait pas compte....

"Lyrev..."

Comment lui expliquer ça?

"Les humains ne sont peut-être pas faciles à suivre, mais je peux t'assurer que tu n'as jusque là rien fait de mal. Bien au contraire..."

Les longs discours n'étaient vraiment pas son fort.

"Ça me rend très heureuse d'être avec toi en ce moment et...

Non, il ne fallait pas s'emberlificoter là-dedans.

"Parfois il est permis, et même recommandé, d'être inconvenant et cavalier. Ai-je l'air contrariée?"

Elle lui déposa un baiser dans le cou.

"Quoique tu fasses, ça sera très bien. Laisse parler ton instinct voilà tout. "

Elle approcha son visage tout près du sien, mais sans aller jusqu'au contact. Le jeune homme devait décider par lui-même de ce qu'il voulait faire.
Sous la chemise, sa main glissait doucement des pectoraux aux abdominaux.
Ben oui, il faudrait bien qu'elle ressorte par où elle était entrée...

Mademoiselle ! Mademoiselle réveillez vous !

Il ôta son gant, et posa une main chaude sur l'épaule nue

Comme chaque jour, il avait attendu que le soleil soit a son zénith
Comme chaque jour, il était venu au lac
Comme chaque jour, il avait amené des fleurs, de la nourriture, de l'or
Comme chaque jour, il avait déposé une embarcation sur les flots
Comme chaque jour, son offrande disparu dans l'étendue d'eau

Et alors qu'il s'était dirigé vers sa monture, pour sortir son violon et partager une complainte avec le lac, il avait aperçu le corps.

S'approchant, il avait vu que c'était une demoiselle, et son jolie teint laissait présumer qu'elle n'était qu'endormie. Arrivée a proximité, il avait rapidement remarqué l'abondance de vêtements sur le sol, et avait jeté un coup d'œil aux alentours, cherchant vainement une autre personne. C'est alors qu'il tenta de la réveiller.

De si près, elle était vraiment belle, et la lumière du soleil rendait justice à ses courbes. Il ne pu s'empêcher de remarquer qu'elle avait de délicieuses formes, même si il se reprit, et tacha de fixer son regard sur ses yeux encore clos.