Manoir d'Earl

Lucy ne desserra nullement les dents qu'elle enfonçait dans la main de Ridelgald, en revanche elle battit des jambes avec une rage redoublée. Tant et si bien, d'ailleurs, qu'elle parvint à balancer un grand coup de pied dans le menton de l'Ilymis, le faisant lâcher ses graines miraculeuses sur le sol.
Elle enfonçait ses ongles dans l'avant bras du soldat sans cesser de foudroyer Fanaa du regard.
Sa Seigneurie avait posé les mains sur cette fille. Cette fille avait épongé son sang à sa place, alors que c'était à elle, à elle de le faire ! Ce sont ces yeux violets qu'elle voulait griffer !

- Franchement...

Ridelgald recula pour mettre tout le monde hors de portée des longues jambes de la petite servante.

- ... pour "croquer des graines", il faudrait la calmer suffisamment pour quelle commence par cesser de me croquer moi. Dans l'état où elle se trouve, elle est capable d'aller crever les yeux à quelqu'un si jamais je la lâche. Donc si vous pouviez trouver quelque chose de mieux avant que je n'aie d'autre choix que de l'assommer pour éviter une victime de plus, ça serait pas mal.

-Vous avez raison. Aux grands mots les grands moyens, dit Graouill-hi en se massant le menton d'une voie agacée. L'assommer serait vulgaire, mais j'ai là un sort que l'on utilise sur les grands blessés pour les opérer dans le calme.

Il commença à rassembler son elixia pour la moduler. Elle émanait comme des bandeaux de lumière de sa main droite.

"La douleur t'égare, entre des ombres tu te débats,
La lumière te guide, en santé tu t'éveillera"

A la dernière syllabe, l'élixia jaillit et fondit sur la servante. Elle n'eut le temps de rien faire, déjà ses muscles s'engourdissait et ses pensées s'effaçaient.
Tandis que son sort faisait effet, Graouill-hi ramassa quelques graines et les remis dans son sac. Elles étaient devenu inutiles.

C'est alors qu'il remarqua la présence de Fynarine. Il se sentit soudain honteux d'avoir ainsi perdu son calme. Sûrement aurait-il dû réagir autrement.

-Excusez moi pour mon emportement. J'ai cru comprendre que c'est en parti à vous que nous devions la vie de nos amis. Soyez-en infiniment remerciée.

Ridelgald finit de soulever Lucy inconsciente dans ses bras et alla l'installer dans une des chambres de l'étage, suivi par une cohorte de domestiques anxieuses. Il leur accorda un regard presque aussi sévère que ceux d'Earl.

- Si je vous demande de la surveiller sans la laisser seule une seule minute, vous le ferez ?

Evalda, qui se trouvait en première ligne des troupes, opina fébrilement.

- Mais si jamais elle s'énerve encore...
- Ca m'étonnerait. Si elle demande des nouvelles de sa Seigneurie, dites-lui qu'il va mieux.
- Mais c'est...
- Je sais.

Le soldat ressortit tout en se bandant la main avec l'efficacité de quelqu'un qui a bel et bien l'habitude de servir d'assistant de fortune à un clerc. Il serra le noeud avec ses dents tout en dépassant le petit groupe en haut de l'escalier.

- M'étonnerait que vous soyez autorisés à le voir. Il était déjà en mauvaise santé avant même d'arriver ici, et tout ceci n'a fait qu'accélérer l'évolution de cette fichue maladie elixienne. Seules les personnes capables de contrôler leur elixia à la perfection peuvent l'approcher. Le moindre flux d'énergie mal réprimé pourrait lui être fatal au point où en sont les choses.

Il redescendit récupérer le sac qu'il avait posé sur une chaise. Les flacons de potion qu'il avait été chercher dans le bureau à l'étage émirent un petit tintement dans les profondeurs du bagage lorsqu'il passa la sangle sur son épaule.

- Enfin, je me vois mal vous empêcher de me suivre...

*Ah, quand même!*
Lynn était ravie que Michael ait abondé dans son sens. Elle réprima une envie de tirer la langue au Levitis antipathique.
L'intervention de Graouill-Hi attira soudain son attention, et elle reconnu la jeune femme qui avait si bien soigné Fanaa. Lynn se précipita vers elle, et impulsivement, la serra dans ses bras.

"Vous voilà! Merci, merci, merci! Et désolée de vous avoir agressée lorsque nous nous sommes croisées... enfin, heurtées."

N'étant pas très à l'aise avec les démonstrations d'affection, elle interrompit l'étreinte et s'adressa à son frère, qui avait fait son possible pour se tenir à l'écart de l'agitation.

"Tu as perdu ta langue toi? Allez, remercie la Dame! Et allons voir notre autre sauveur qui a maintenant besoin d'être sauvé."

"Heu... merci Dame... heu... hem. Merci noble inconnue!"

Ridegald passa alors devant eux. Tout ce que Lynn avait compris de sa tirade, c'est qu'ils pouvaient le suivre...

"Et bien en route, ne trainons pas!"

Les pensées de la Dédrane n'étaient pas encore toutes à leur place, elle se levait à peine et trop de questions se bousculaient en même temps dans son esprit. Ce n'est que lorsque Mickael releva le nom de Syld qu'elle se rappela que les deux Lévitis avait évité de dire leur nom. Elle maudit intérieurement son don pour faire des gaffes dans les pires moments, malgré le fait que personne n'avait pris la peine de lui dire clairement se taire, ni pourquoi.
Elle n'eut pas beaucoup de temps à passer dans ses pensées, la jeune fille qui passait son temps à crier après les gens se rua vers elle et la ceintura sans lui laisser le temps de réagir.

Lynn&Sek a écrit:

"Vous voilà! Merci, merci, merci! Et désolée de vous avoir agressée lorsque nous nous sommes croisées... enfin, heurtées."
"Tu as perdu ta langue toi? Allez, remercie la Dame! Et allons voir notre autre sauveur qui a maintenant besoin d'être sauvé."
"Heu... merci Dame... heu... hem. Merci noble inconnue!"

Très surprise par ce geste d'affection, elle en oublia un instant le reste de ses pensées, ne sachant trop comment réagir.

- Euh merci... j'ai fait de mon mieux, mais je crois que tout le mérite revient au Seigneur...

Elle ne fini pas sa phrase. Elle en avait déjà trop dit, elle ne recommencerait pas encore.
Ridelgald en profita pour sortir de la maison, confiant Lucy aux soins des autres servantes. La clerc retourna rapidement dans la chambre pour récupérer son sac contenant les futures potions, et courut pour rattraper le Lévitis qui avançait à grand pas dans la neige.