Confins du désert rouge - village des falaises

Talisham réfléchit quelques instants.

- Et bien, nous allons vers Fédoran, j'ai un rapport à faire et quelqu'un à déposer, et je dois m'acquitter de cette tâche au plus vite.

Le regard appuyé qu'il lança à Aryllë sous-entendait nettement qu'il n'était pas particulièrement ouvert à la contestation sur ce point.

- Aussi, si ce village se trouve sur notre route, je n'y vois aucun inconvénient, mais dans le cas contraire, je me verrais au regret de décliner.

Mellyna réfléchit quelques instant.

-Je ne suis pas sûre que cela soit sur votre route... Je dirai que oui mais je ne suis pas certaine de mon sens de l'orientation dans ce désert. C'est vraiment difficile de se repérer ici, comme pour empêcher les étrangers d'y séjourner.
Bref, il faut demander à Thani, il connait parfaitement les routes du désert. Ils ne doivent pas être bien loin. Suivez-moi.

La dédrane reprit le sac qu'elle avait posé à ses pieds, laissa le temps à la femme de feu pour ranger son installation improvisée et partit d'un pas décidé sur les chemins escarpés que l'Eyerash lui avait appris à arpenter. Elle se retourna pour voir s'ils la suivaient.


*Il ne faut pas que j'oublie de demander à Aryllë de me confier le sabre de Fanaa. Ca me fera une excuse pour retourner au Temple et ne pas rester bloquée au village. Thani va être déçu...*

Ils rattrapèrent rapidement l'eyerash et la jeune fille qui ralentissait le pas habituellement rapide de ce dernier.
Thani les avaient entendus et s'était immobilisé, la hache prête à être abattue si besoin.

-Ce que tu es nerveux en ce moment. Ce n'est que moi. Enfin avec Talisham et Aryllë.
-On dirait que tu n'as pas conscience des dangers que renferment le désert.
-Les derniers dangers étaient surtout la nuit la dernière fois.
-Tu as trop naïve... Bougonna Thani.
-Oh, tu ne vas pas t'y mettre toi aussi ! On croirait entendre le poussin !

L'homme faillit s'étouffer pour la deuxième fois en 10 minutes.

-Parce qu'il te parle ?!

Mellyna n'aurait su dire si Thani était fâché ou inquiet, peut-être les deux. C'est avec une voix de petite fille prise en faute qu'elle répondit :

-Euh, oui...

L'eyerash, qui avait remis sa hache en travers de son dos massif, se prit la tête dans les deux mains :

-J'aurai dû m'en douter. Mais dans quel pétrin t'ai-je mise en t'amenant dans ce désert ?
-Ce n'est pas la question, Talisham voudrait savoir dans quelle direction se trouve Fédoran.

A la mention des inconnus, l'eyerash se renfrogna immédiatement.

-C'est par là, dit-il en indiquant un vague chemin devant eux.

*Ses phrases laconiques reprennent le dessus, il est vraiment sauvage.*

-C'est dans la même direction que le village, Thani vous indiquera la route à suivre une fois que nous serons là-bas, traduisit Mellyna.

L'homme grommela pour toute réponse avant de se remettre immédiatement en route, sans un regard pour qui que ce soit.

- Bon, et bien dans ce cas, faisons donc route ensemble, plus on est de fous... et plus il y a de chance pour que quelqu'un fasse quelque chose de stupide qui pimente un peu le voyage !

Il regardait le dénommé Thani en disant cela, espérant le faire bisquer un peu. Dans la liste des activités favorites de l'elven, "asticoter les gens grognons" occupait une bonne place.

- Mais vous ne devriez pas trop avoir à vous plaindre de nous. Enchanté messire Thani, Talisham, à votre service. - Il fit une légère courbette - Pourquoi ne pas saluer notre rencontre à la manière des caravaniers, puisque nous sommes dans le désert ? D'après leurs croyances, lorsque deux groupes se joignent sur un trajet, leurs meneurs doivent chacun à leur tour boire une mesure de liqueur dans un gobelet de cérémonie, afin de placer le voyage sous les meilleurs auspices. Une façon de lier temporairement leur sort sous le regard des puissances qui veillent en ces lieux. Figurez-vous... - Tal fouilla une nouvelle fois dans sa sacoche - que j'ai justement un de ces gobelets sous la main ! À force de sillonner Adreis dans tous les sens, j'ai appris à toujours emporter certains objets utiles.

Il s'assit de nouveau en tailleur, versa une partie du contenu de sa gourde dans le gobelet, l'avala cul sec, puis servit de nouveau et tendit le récipient devant lui.

- Que ceux qui veulent participer fassent comme moi. Chacun est libre de le faire ou non, mis à part les guides de chaque groupe qui eux sont obligé de participer pour que cela fonctionne. Un refus porterait malheur. Messire Thani ?

Ce que Talisham ne précisait pas, c'était que la liqueur était suffisamment forte pour dérider un cheval. Lui-même avait l'habitude, et n'avait pas besoin de ça pour être joyeux de toute façon. Mais il était curieux de voir ce que cela donnerait sur l'homme du désert. D'autant plus qu'il avait discrètement forcé la dose par rapport à ce qu'il avait ingurgité...

Mellyna riait sous cape, cela rendit Thani encore plus bougon. Cependant, il avait été bien éduqué, il s'arrêta et revint vers le petit groupe. Il répondit à l'inclinaison de l'elven et s'installa en face de lui.

-Enchanté Talisham. Je dois néanmoins décliner votre généreuse offre. En tant qu'Eyerash, je ne bois jamais d'alcool, cela m'est interdit. La tradition a toujours des exceptions. Dit-il avec une politesse un peu forcé et la joie de contredire l'homme.


La dédrane ne voulut pas que la situation se corse d'avantage, elle passa entre les deux hommes, prit le verre des mains de Talisham et avala d'un coup la boisson destinée à Thani.

-Voila, comme ça pas de mauvais oeil !
Elle faillit chanceler mais se retint à temps avant de s'effondrer sur un des garçons assis au sol.
Oula c'est fort votre truc !

- Hem, ce n'était pas vraiment un dosage pour une demoiselle, plutôt pour un homme bien bâti, si vous voyez ce que je veux dire... Peut-être allez-vous avoir besoin de... enfin... Cette liqueur n'est pas tout à fait un alcool, c'est fait avec certaines plantes particulières, et c'est plutôt difficile à se procurer. L'avantage, c'est que ça n'endort pas, que ça n'assomme pas, que ça ne rend pas malade et que ça ne donne pas la gueule de bois. L'inconvénient par contre, c'est qu'il s'agit d'un euphorisant et d'un désinhibiteur assez puissant...
J'avais mis là-dedans de quoi bien dérider pour quelques heures un Eyerash ronchon, sauf votre respect Thani, alors allez savoir quelle va être la réaction sur dame Mellyna...

L'elven se releva.

- Bon, ça ne peut pas vraiment faire de mal... Il vaudrait mieux la surveiller quand même.

-Si vous saviez...

Thani n'avait pas eu le temps de réagir, Mellyna faisait décidément n'importe quoi pour le rendre fou ! Il souffla en se relevant, résigné.

-... la surveiller est un doux euphémisme. Déjà qu'une petite dose d'alcool a un effet catastrophique sur elle... Alors avec une dose aussi forte de cette boisson... Elle va faire un vrai dégât... Ne vous approchez pas trop, sauf si vous êtes prêt à perdre un bras en voulant lui serrer la main.

La dédrane commençait à partir, elle chantonnait en dansant sur le chemin et ouvrait la route.

-Au moins c'est la bonne direction.
L'eyerash paraissait beaucoup plus que ses quarantes ans en cet instant.

Contrairement à son habitude, Aryllë avait le visage fermé et les bras croisés. Elle ne semblait nullement ouverte à la taquinerie et à la légèreté. Elle n'avait même pas tiqué lorsque Talisham avait fait allusion à "quelqu'un à ramener". Elle l'avait comprise et une partie d'elle s'en était offusquée mais elle n'avait même pas répliqué.

- Accélérons le pas, voulez-vous ?

Le Désert. Le Désert déclenchait toujours les même réactions : le plaisir d'être chez soi et le fait d'être aux abois en craignant les "mauvaises" rencontres. En plus aller jusqu'à un village ... c'était plus risqué. S'être laissée voir par Thani et Masha l'était tout autant. Il suffisait d'un hasard, d'une malchance et le secret pouvait être éventé.

Elle remarqua l'attitude de Thani et les minauderies de l'adolescente à son égard (minauderies auxquelles il ne semblait même pas faire attention), mais n'arrivait pas à se détendre assez pour allez le voir et tenter de l'apaiser. Elle voulait s'éloigner au plus vite des villages, ayant l'impression de se jeter dans la gueule du loup.

Soudain, elle pila.

- Le village est là, après le prochain tournant.

On ne le voyait pas encore, mais c'était exact.

- Il faut nous séparer ici. Talisham ? On y va ?

Elle était rarement aussi sèche mais se sentait incapable de déstresser.

-Oh ! Aryllë ! Tu pars déjà ?

Mellyna venait juste de se rendre compte que non, elle n'était pas seule sur ce chemin si amusant. Elle voulut s’agripper au bras de la jeune fille mais Thani la retint à temps.

-Tu me donnes le sabre de Fanaa ? Est-ce qu'on pourra se revoir ? J'aimerais beaucoup parler avec toi au calme de ce que tu sais. Tu vas où maintenant ? Talisham tu pars aussi ? Je n'oublierai pas de donner le papier à Fanaa ! C'est chouette cette boisson, on entend la musique du désert ! Lalala !

Elle lui fit un clin d'oeil d'adolescente, elle gigotait dans les bras de l'eyerash qui commençait à transpirer sous l'effort produit pour la retenir.

- Oui il est temps que je m'en aille. Talisham a assez répété qu'il était venu me chercher alors il n'y a plus de temps à perdre.

Elle avait les mâchoires crispées et devait se forcer à desserrer les poings et prendre un ton aimable où ne perçait pas trop la tension qui l'habitait.

- A propos de Fanaa, ce serait tout aussi bien que tu me dises où elle se trouve, ainsi je pourrais le lui rendre moi-même ce sabre. Et vérifier qu'elle va vraiment bien. Et lui donner quelques conseils.

La dédrane arrêta de se débattre, croisa les bras et dit d'un ton buté :

-Non. Non, non, non. Elle vous contactera si elle est d'accord. Non. Tu veux lui laisser une adresse toi aussi ? Si vous êtes pressés vous n'avez pas le temps d'aller la voir.

Un silence.

-On ne pourra pas parler alors ? C'est dommage...

Talisham jeta à Aryllë un regard à la fois interrogatif et courroucé. Ce comportement était plus qu'inhabituel de la part de la jeune femme, et terriblement grossier. Quelque soit le ton employé, on ne revenait pas sur un accord, et on ne mettait pas en doute la parole d'une gardienne.

- Je croyais que nous étions d'accord tout à l'heure, dame Mellyna n'a pas à nous confier un secret qui ne lui appartiens pas. Si tu tiens tant que ça à partir maintenant, allons-y, mais ne soit pas malpolie. On peut faire confiance à une gardienne du Ternaël. Si tu n'en est pas toi-même persuadée, crois-moi, je sais de quoi je parle. Laisse-lui le sabre, et allons notre chemin.

Il se tourna vers Mellyna.

- Ma Dame, je vous souhaite tout le bien. Il faudra au moins deux jours pour qu'une réponse revienne suite à mon rapport. D'ici là, nous serons à Fédoran. N'hésitez pas à utiliser vous-même si vous le désirez les indications de ce parchemin.

- Non ! Je ne suis pas d'accord Talisham ! Pourquoi est-ce qu'elle s'attache autant à son refus ? Moi je trouve cela bizarre et intrigant. Voir inquiétant. Est-ce que Fanaa se cacherait de toi à ton avis ? Est-ce qu'elle aurait des raisons de faire ? Non. Cela m'étonnerait.
Mellyna, est-ce que Fanaa vous a expressément demandé de ne pas divulguer l'endroit où elle se trouve ? Pourquoi ? Est-ce qu'elle se cache ? Est-ce qu'un danger la guette ? Si c'est le cas nous pouvons l'aider. Alors il faut nous le dire, il le faut ! Pourquoi la garder au secret comme un objet précieux que vous voudriez garder pour vous seule ?
Si vous tenez tant que cela à la garder pour vous, alors je vous demande de me donner une bonne explication, car je peux vous assurez, moi, et vous jurer sur tout ce que vous voulez qu'elle n'a pas à nous craindre et qu'elle ne peut pas vouloir nous fuir. Ou alors c'est que quelque chose l'a traumatisée.
Mellyna Dahéni, moins vous m'en dites et plus je m'inquiète et plus je doute de vous.
Talisham ne me fait pas ses yeux-là ! Je dis ce que je pense. C'est plus que bizarre qu'elle campe sur une telle position.

La proximité de Thani et Masha l'affolait de plus en plus. Et si ils se rappelaient de son visage ? Et si ils parlaient ? Si ils prononçaient son nom et que d'autres l'entendaient ? Aryllë n'aurait jamais dû s'approcher autant. Elle regrettait maintenant d'être descendue à la rencontre de Mellyna alors qu'elle n'était pas seule, c'était trop de risque.

En dernier recours elle tendit une main vers le petit dragon et se concentra sur lui de toutes ses forces.

- Dis lui, toi ! Il y avait une supplique dans sa voix.

*Dis lui, s'il te plait. Un secret pour un secret. Nous connaissons le père de Fanaa et c'est pour lui que nous veillons sur elle. Un secret pour un secret. Il faut nous dire où elle est maintenant. Je t'en prie.*

L'elven était effaré.

- Mais est-ce que tu t'entends parler au moins ? Prends-tu seulement le temps de réfléchir à ce que tu dis ? Tu es malade ? Droguée ?

Aryllë semblait être en pleine crise de paranoïa. Voilà qu'elle se mettait à accuser une innocente, plutôt sympathique au demeurant, et gardienne du Ternaël de surcroît, de faire de la dissimulation.

- Il n'y a rien de bizarre là-dedans. Connaissant ma propension à me fourrer dans les ennuis, si deux inconnus venaient te demander où je me trouve, aussi aimable soient-ils, tu leur répondrais ? Tu as oublié tout ce qu'on t'a appris sur les secrets qu'il faut garder et comment il faut les garder ou quoi ? Ah, s'il ne fallait pas économiser l'eau dans le désert, j'aurais déjà demandé à ce qu'on t'en vide un grand seau sur la tête pour te faire reprendre tes esprits. Dame Mellyna te l'a dit: Fanaa va bien. La retrouver et m'en occuper, si elle le veut bien, c'est ma tâche suivante. Toi, tu dois attendre sagement de voir quelle décision le chef et le conseil prendront à ton sujet, et tu devrais t'abstenir de faire des vagues en attendant. Est-ce que je suis assez clair ? Allez, reprends-toi, donne le sabre, et viens.

La dispute troubla Mellyna et éclaircit pour un instant ses idées.

-Ne vous disputez pas... C'est juste que je ne connais pas assez bien Fanaa pour savoir pourquoi elle est dans ce désert. Je ne cherche pas à me l'approprier, c'est ridicule, on peut posséder des objets, jamais des êtres humains. Je cherche juste à ne pas gaffer...

Avant qu'elle n'ait pu ajouter quoi que ce soit le dragon avait transmis le message. Assorti d'un *Elle me prend pour un chien messager maintenant ! * plein de dédain, mais le secret était passé. Laissant la dédrane bouche bée quelques secondes. Elle finit par céder aux suppliques de la jeune fille d'une voix monocorde :


-Quand je suis partie elle était toujours au Temple, les gardiens jumeaux de ce lieu veillent sur elle. Elle est en sécurité là-bas.

Ses yeux s'étrécirent et devinrent entièrement verts, un vert douloureux à regarder :

-Et si vous m'avez menti et que vous lui faîtes du mal, je vous tuerai de mes mains, je le jure.
Je ne suis pas une dame Talisham, je ne suis qu'un monstre et vous avez intérêt à ce que Fanaa soit contente de vous voir.
Je vous accompagne pour m'en assurer.

Thani avait relâché un peu ses bras quand il avait vu qu'elle ne plaisantait pas.

-Tu n'essaies même pas ?

Malgré sa carrure, la voix de l'eyerash était celle d'un petit garçon perdu. Mellyna se calma aussi vite qu'elle s'était enflammée, ses yeux redevinrent doux et turquoise.

-Je suis désolée Thani, ce n'est pas mon heure. Le désert ne veut pas encore de moi.

Elle se retourna dans son étreinte.

-Je t'apprécie vraiment, c'est pour cela que je suis désolée. Mais je ne suis pas partie d'une prison pour en trouver une autre, aussi agréable soit-elle.
Fanaa est ma première amie depuis un temps immensément long, je dois la protéger.

L'eyerash ne se mit pas en colère, il n'y avait que de la déception dans son attitude. Il essaya de sourire :

-Lor occupe encore trop de place dans ton coeur et ton amie a le reste. Tu es trop entière.
-Ne sois pas si dur, tu as une grande place toi aussi. C'est juste que je goûte tout juste à la liberté...
-Je comprends.

Il l'embrassa, malgré sa timidité, les inconnus qui les entouraient, le dragon sur sa tête et l'adolescente possessive qui les observaient.

- Malade ? Droguée ? Mais enfin Talisham, qu'est-ce que tu dis ?

Aryllë fronça ses sourcils roux et raffermit sa prise sur le sabre, toujours pas décidée à le rendre. Heureusement, Mellyna accepta enfin de leur dure où se trouvait Fanaa. Enfin ! La femme se calma instantanément. Enfin ... en partie, la présence de Thani et surtout de Masha la mettant mal à l'aise.

Elle sourit de nouveau.

- Tu aurais dû le dire tout de suite ! Si elle est avec les Ilahi, elle ne craint rien du tout. Ah que je suis rassurée ! Tiens.

Elle lui rendit le sabre.

- Merci.

Masha s'était renfrognée en voyant Thani si entiché de Mellyna. Mais pourquoi est-ce qu'aucun homme ne la regardait, elle ? Zut ! Bon sang zut ! Pourquoi ?! Boudeuse, elle s'intéressa enfin aux nouveaux. L'homme était plutôt mignon. La femme ... elle lui rappelait quelqu'un, mais qui ?

- De quel village avez vous dit que vous veniez déjà ? Je ne me souviens pas.
- C'est normal, je ne l'ai pas dit. Mon village est très loin, au-delà du domaine des Illahi, bien au-delà. Talisham ? Il faut vraiment qu'on y aille maintenant. Mellyna, merci encore et bien sûr, nous pourrons parler mais pas maintenant et pas ici. En privé. S'il vous plaît.

Elle se tourna ostensiblement de façon à tourner le dos à l'adolescente et forma les mots sans rien prononcer :

*Il faut s'en aller. Vite. S'il te plaît.*



Masha s'approcha de la Dedrane.

- Mais je ne comprends pas Mellyna, tu vas partir ? Vraiment ?

Le moment tendu s'était éventé, l'alcool, chassé momentanément par l'adrénaline, reprit le dessus. La dédrane se mit à tournoyer lentement en battant l'air avec le sabre :

-Ouiii, je repars en voyage, tralala !

Elle s'arrêta un moment et considéra Masha avec étonnement :

-Mais je n'allais pas rester ici jusqu'à ce que vous soyez tous mort !
Les problèmes sont rentrés dans l'ordre. Tu n'es pas contente de retourner vers ton foyer ? Ici tu pourras te trouver un fiancé qui t'aime et qui prendra soin de toi. Tu m'as dit que c'était ce que tu attendais de la vie.

Elle fit quelques pirouettes avant de reprendre.

-Je cherche mon but ! Tant que je ne l'aurai pas trouvé je ne pourrais ni m'installer ni rentrer chez moi !

Mellyna chantonnait :

-Là-bas, c'est la mort qui m'attend, le néant et la solitude jusqu'à ce que mon coeur soit transpercé par ma propre épée. Comme les autres ! Ils sont partis, m'ont laissé seule !
Je m'en fiche, je m'en vais, je finirais bien par trouver !

Elle fit un dernier bisou à Thani, qui la retint un moment dans ses bras. Il ne voulait pas qu'elle parte, il en aurait pleuré s'il était encore un adolescent.
La gardienne tapota en douceur la tête de Masha (enfin elle voulait le faire avec douceur, l'adolescente aurait un bon mal de tête jusqu'à ce soir) et commença à sautiller en direction du temple.

-Grandit bien Masha et pas de bêtises !

Thani regarda les deux compères :

-Bon, ben, je vous la confie. Bon voyage, que le désert soit clément.

A Masha :

-Viens, je te ramène chez toi.

La tension s'était, heureusement, désamorcée d'elle-même. Soupirant de soulagement, Talisham rétracta l'aiguille qu'il avait auparavant fait jaillir du dispositif qu'il portait au doigt, juste au cas où...

- Et bien, il semble qu'il soit temps pour nous de prendre congé. Messire Thani, je ne suis pas sûr que dame Mellyna ait particulièrement besoin de protection, - il frissonna au souvenir du bref instant pendant lequel la dédrane avait émis son avertissement - mais tant que ses pas et les nôtres arpenteront le même chemin, elle n'aura rien à craindre. Bonne continuation à vous, peut-être aurons-nous le plaisir de nous recroiser.

Il était presque tenter de faire traîner pour stresser un peu plus Aryllë, mais le procédé aurait été mesquin. Sur un dernier signe de la main, il s'engagea derrière la dédrane qui, bon gré, mal gré, était donc leur guide pour cette partie du trajet...

Enfin !! Enfin ils partaient ! Lorsque Thani et Masha ne furent plus en vue, Aryllë poussa un long soupir intérieur, puis pporta deux doigts à sa bouche et siffla. On entendit un bruit de galop et bientôt deux équidés aux crins flamboyants parvinrent au petit groupe et s'arrpêtèrent qui devant Aryllë, qui devant Talisham. la femme caressa le chanfrein de sa monture.

- Mellyna, vous allez monter devant moi. Pas d'inquiétude je vous tiendrai bien. Oh ... et il n'est pas la peine de parler de tuer pou de mourir. Nous sommes du même côté, il n'est pas question de vous faire du mal.

Aryllë posa une main compatissante sur l'épaule de la Dedrane.

- Allons-y maintenant. Accrochez vous bien, Foudre et Raïtenn sont du genre ... rapides !

Mellyna put découvrir qu'en effet, les montures de feu filaient comme le vent. En à peine plus d'une heure, ils se retrouvèrent camouflés discrètement non loin du sanctuaire.

- Mellyna, nous sommes arrivés ! Vous pourrez marcher jusque là-bas ? Je ne peux pas vous accompagner. Tenez, voici le sabre de Fanaa. Dites-lui nos noms s'il vous plaît et elle viendra. Je pense. Nous vous attendons ici, c'est d'accord ?
Talisham arrête de taper du pied. Nous allons vite repartir, sois patient :pp

Le voyage c'était fait rapidement et silencieusement. Le temps pour l'elven de préparer la suite dans sa tête et, il fallait l'espérer, pour Mellyna de reprendre un peu ses esprits.
Oui, Talisham tapait du pied lorsqu'Aryllë envoya la Dédrane au temple, et il s'agissait bien d'impatience, mais dans l'immédiat, ce n'était pas repartir qu'il voulait. Il désespérait de pouvoir être enfin seul avec la jeune femme pour pouvoir dire ce qu'il ne pouvait pas raconter devant témoin.
Le pas de Mellyna ne lui semblait pas encore très assuré lorsqu'elle s'éloigna, mais il n'aurait su dire s'il s'agissait de reste d'euphorie ou de l'effet de la chevauchée express.
Dès qu'elle fut hors de portée de voix, Talisham se lança.

- Enfin seuls ! Avant que je ne te réclame des explications quant à ta conduite de tout à l'heure, je vais commencer par te rappeler une chose: nous sommes des elvens, des gardiens, nous n'existons que pour expier et servir. Alors, les missions d'abord, le reste ensuite. Aussi important que le reste puisse nous paraître, nous n'avons pas le droit d'en décider. Même si aucun de nous ne sait pourquoi les autres en sont là, nous savons tous que notre liberté se résume à ça. Et si le conseil en décide ainsi, notre vie elle-même peut s'arrêter en un clin d’œil.

Tout en prononçant ces mots, il avait pris une voix grave, tonnante, une expression si neutre qu'elle ne pouvait que dissimuler une colère sur le point d'éclater et des yeux durs, qui pourraient presque lancer des éclairs.

- Plus que tout autres, nous ne souhaitons pas que ta vie s'arrête bêtement. D'autant que tu n'est pas comme nous autres marquée du sceau de l'infamie. S'il faut te couvrir, nous le ferons et tu le sais, même si je ne devrais pas le dire.
Alors si tu veux prendre des risques stupides, par toute la création, préviens-nous !

Sur cette dernière phrase, il reprit son attitude normale.

- Voilà, ça c'était le message de Vor. Argl, mais comment il fait pour garder cet air crispé en permanence ? Ça me dépasse. Pour ma part je ne m'associe pas à la première partie, trop moralisateur. Si tu peux tricher, triche, mais par pitié, un peu de subtilité ! Par contre, la seconde partie, on la signe à deux. Personnellement je voulais ajouter "et pour nous prévenir, laisse-nous un mot, comme ça, ça te laisse au moins le temps qu'on le trouve comme avance avant qu'on te rattrape", mais pour le coup c'est Vor qui ne signe pas cette partie là.

Il enchaîna avant qu'Aryllë ne puisse répondre.

- Tss tss tss, maintenant, pour être sûr que ce soit bien clair, je te raconte ce que j'aurais dû te dire quand j'ai dû disparaître. Vor est déjà au courant. Alors écoute...

L'elven se lança dans le récit de ce qui c'était produit aux ruines blanches, sans rien omettre, et sans trop en rajouter, puisqu'il devait finir avant que Mellyna ne revienne.

- Maintenant tu sais tout. Le conseil et le chef ne sont pas au parfum, néanmoins je leur ai expliqué que j'avais contracté une lourde obligation. En échange de la réalisation d'une mission quasiment suicide dont je n'ai pas le droit de parler, j'ai obtenu un congé jusqu'à ce que cette obligation soit remplie. Quelques sceaux magiques veillent à ce que je ne triche pas, autant sur le fait de garder le silence que sur le fait de remplir mes obligations. Comme je considère que le retard pris entraîne des intérêts qui ne sont pas chiffrables, les sceaux sont placés de façon à ce que mes obligations ne soient considérées comme remplies que quand, en mon for intérieur, je serai convaincu que c'est le cas.
Maintenant, tu as droit à tous les commentaires que tu veux.
Et si au passage tu pouvais m'expliquer ce qui dans le coin semble te rendre complètement dingue, ça pourrait me faciliter la vie à l'avenir...

-Mmmh, je me dépêche.

La course sur le dos de la monture avait fini de la dégriser. Ça avait été une chevauchée agréable, le vent, bien que chaud, rafraîchissait à cette vitesse.
Elle n'avait jamais eu l'occasion de monter à cheval, ces grandes bêtes préféraient les plaines aux forêts et elles étaient ralenties sous la voûte des arbres. S'il n'avait pas fait si chaud, Mellyna aurait bien fait un peu la course avec eux pour se détendre les nerfs. Elle n'aurait pas tenu le rythme longtemps, mais l'exercice lui manquait.
La dédrane descendit d'un mouvement souple à bas du cheval et se dirigea tranquillement vers les appartements de Fanaa. Son pas était hésitant car elle avait peur d'avoir fait une gaffe. Les questions se bousculaient dans sa tête, mais il n'était pas l'heure des réponses, pas encore. Elle se faufila dans le sanctuaire sans être vue, elle n'avait pas envie de bavarder avec qui que ce soit, juste de voir Fanaa et de s'assurer qu'elle n'avait pas fait une erreur monumentale en conduisant ces deux inconnus ici.

La petite pièce était vide, il n'y avait pas le sac de la danseuse.
Peut-être chez le lévitis grincheux ? Si les deux s'étaient installés ensemble, ce serait bon signe. Elle n'était partie q'une matinée mais on ne savait jamais...
L'esprit romantique de Mellyna s'emballa un moment, avant de chasser de son esprit le beau tableau que les jeunes gens feraient en se tenant la main, d'un hochement de tête.
La chambre du lévitis était elle aussi exempte de trace de la jeune fille, en y regardant bien pas de trace du seigneur non plus.

La dédrane reste un moment interdite, Fanaa ne serait pas partie sans lui dire au revoir tout de même ? Si ? Elle se sentit un peu triste, mais avant de déprimer, il valait mieux demander confirmation aux personnes les mieux renseignées du désert : les servantes du palais.

Elle les trouva facilement en déambulant aux alentours des cuisines. Une petite rousse lui apprit que Fanaa avait mis les voiles avec Earl le matin même et qu'ils étaient partis avec un guide vers Fedoran. La dédrane la remercia et repartit, déçue, vers Aryllë et Talisham qui l'attendaient.

Le visage d'Aryllë passa de l'exaspération à la surprise en passant par l'incrédulité tandis qu'elle écoutait l'inépuisable Talisham. Quant il eut terminé, elle leva les mains.

- Attends attends, ça fait beaucoup pour moi là. beauuuuuuuuuuuuucoup dirais-je même !

Elle lui jeta un oeil méfiant.

- A moins que tu m'ais dit tout ça pour m'assommer sous les nouvelles et que je ne trouve rien à répliquer ? Bon bon bon. Reprenons dans l'ordre. Du moins vais-je essayer.
Petit 1 : je ne suis pas un paquet que l'on ramène au poste de livraison, mission ou pas. Tut tut je commence à peine à répondre, ton tour est passé alors chut. J'admets ... bon je reconnais complètement que je ne me suis pas très bien comportée, je devais avoir l'air à demi-hystérique. Je m'en rends compte maintenant et ... elle se passa une mains sur la figure ... c'est malheureusement trop tard.
Oh et puis je n'ai pas envie d'énumérer finalement. J'ai demandé au conseil. Je leur ai demandé, je savais qu'il y avait une concentration étrange d'elixia quelque part dans le désert. C'était anormal, ça rappelait les vibrations de ces gens de la secte de la lune rouge. Enfin non. En vérité ce n'était pas la même chose mais c'est ce que j'ai raconté pour qu'ils prennent le problème au sérieux. Ce fut un échec. Ben oui, ils ont pu aisément vérifier qu'il ne se trouvait pas d'artefact dans la zone. Et puis ils rechignent toujours à m'envoyer en mission dans le désert alors que je suis la plus apte à supporter le climat ! Mais non. Eux, tout ce qu'ils voient c'est que j'y viens pour des raisons personnelles. Que je saute sur n'importe quelle occasion pour venir faire un tour ici. Et ils ont raison, ils le savent, je le sais, mais je continue quand même. Ca reste chez moi ici ... enfin d'après ce que tu sembles dire, après le coup que je viens de leur faire, ils risquent de ne pas me renvoyer dans le secteur d'ici un bon bout de temps. J'essaierai de revenir, mais je devine qu'ils vont me surveiller un peu plus. Ou m'envoyer en mission loin, très loin d'ici.

Aryllë soupira.

- J'ai besoin de ma dose de soleil et de sable. J'ai besoin de m'approcher de mon village pour observer comment va ma soeur. Elle vit avec ma grand mère car nos parents sont morts il y a quelques années. Et ma grand-mère c'est pas un cadeau. Elle est très attachée aux rites, aux croyances et au respect de nos traditions. Et puis elle déteste les étrangers. Bon, elle n'est pas la seule mais elle est assez véhémente. Et ma petite soeur semble en colère contre le monde entier. Mais elle va bien. Enfin je suppose, là je suis vraiment venue uniquement pour la mission que je m'étais fixée et je ne l'ai pas vue. Et c'est ça qui me rend dingue : le risque de croiser quelqu'un qui se rappelle de sa grande soeur disparue et me reconnaisse. Toutes les deux on se ressemble, notre couleur de cheveux est différente mais nous avons les mêmes traits. Et elle ne doit pas savoir.

Elle secoua doucement la tête et prit les mains de Talisham.

- Je ne devrais pas te parler de ça, je suis désolée. Je sais que pas mal d'entre nous n'ont plus aucune famille sur qui veiller. Et je n'oublie pas que nous ne devons avoir aucun contact avec personnes de notre vie passée mais ... enfin tu le sais, je déteste cette mesure. Nous ne devrions pas être des fantômes. Oui ce que nous protégeons doit rester secret mais si on ne parle pas à d'autres personnes extérieures au cercle, on deviendra fous. C'est déjà assez dur comme ça.

Elle pencha la tête en arrière.

- Quand je pense à Ashk. Lui il respecte scrupuleusement ce point. Il ne parle à personne. Jamais. Il y arrive très bien, je ne sais pas comment il fait. Enfin ...

Quelques secondes passèrent avant qu'elle ne reprenne :

- Voronwë toujours si sérieux et si solennel ... moi non plus je ne sais pas comment on peut être aussi raide et pas drôle pour un sou. Le jour où il éclatera de rire, lui ... mais son message me fait très plaisir. Et tu as très bien imité son expéditeur, bravo ! J'y ai cru, tu sais !

Elle lui prit le coude et croisa son regard.

- Merci à toi aussi pour ton message et ton soutien. Je suis désolée de n'en faire parfois bon, ok. De n'en faire souvent qu'à ma tête. Alors excuse moi encore, et merci.
Et maintenant la meilleure partie : j'ai l'impression que cette femme t'a beaucoup marqué dis moi. Quand tu parles d'elle c'est assez impressionnant. Tu me donnes envie de la rencontrer, quel dommage qu'elle ait fermé les yeux à jamais. Ca n'a pas dû être facile, je suis désolée pour toi. Lui avais tu parlé d'Ashk ? Et le conseil a vraiment accepté que tu lâches tout temporairement pour prendre Fanaa sous ton aile ? Ta plaidoirie a dû être intense et touchante. Mais tu risques d'avoir beaucoup de travail, de ce que tu me dis, lorsque tu l'as laissé elle allait un peu mieux qu'à Illymir mais je n'irais pas jusqu'à dire qu'elle allait bien. Enfin ... tu sais ce que tu fais j'imagine. Et Altarielle n'a pas confié sa petite fille à n'importe qui. Mais je me demande pourquoi elle a dit que c'était elle qui avait fait de Fanaa ce qu'elle est. C'est bizarre. Ah si seulement les morts pouvaient parler ... et surtout ne pas nous quitter trop vite.
Ca serait bien si un jour on pouvait trouver un artefact qui nous permette de voir les défunt et de communiquer avec eux. J'espère qu'il y en a un qui existe et qu'on m'enverra le chercher quand on retrouvera sa trace, pas toi ?

- Je peux tout à fait comprendre ce que tu ressens, et j'aurais probablement fait comme toi... Enfin, sauf que j'aurais inventé quelque chose pour que ce ne soit pas ma faute au final... Mais bon, on verra ça en écrivant le rapport.
Essaie juste de ne pas oublier que l'on tient à toi.

Peu coutumier de ce genre de déclaration, il se racla la gorge et embraya sur un autre sujet.

- Marqué, oui, on peut dire ça comme ça... elle était... C'est difficile à décrire. Impossible même. Certaines choses doivent se vivre. Non, je ne me souviens pas d'avoir parlé d'Ashk, et oui, le conseil a accepté mais ce n'est pas ma plaidoirie qui l'a convaincu. Il s'agissait d'un contrat. Ce que j'ai dû faire en échange...

Un bref instant perdu dans ses souvenirs, l'elven ne put retenir un tremblement.

- Je ne peux pas en parler, mais ce congé a été payé.
Ah, qui sait ce que les défunts pourraient nous dire ? Pour ma part, je ne suis pas certain que ce soit une bonne idée de jouer à ça.

Il frissonna de nouveau. Il lui fallait penser à autre chose. Du coin de l’œil, il aperçut Mellyna qui approchait.

- Ah, notre nouvelle amie sera bientôt de retour parmi nous. Peut-être allons-nous voir Fanaa sous peu.

La dédrane marchait la tête basse, les épaules voûtées et le sabre de Fanaa pendouillait tristement à sa ceinture. Elle mit un moment avant d'arriver à la hauteur des elvens et de les regarder en face :

-Fanaa est partie, ce matin même, avec le seigneur Earl. Ils sont partis à Fédoran pour je ne sais quelle affaire. Je n'en sais pas plus.

*C'est étrange que Ridelgald ne les ait pas accompagné d'ailleurs.*

-Je dois vous paraître ridicule et présomptueuse d'avoir fait tant de cas de ce secret alors qu'elle n'était même plus là.

Mellyna resta silencieuse un petit instant, elle traçait des ronds dans le sable avec ses pieds.

-Je pensais qu'elle me préviendrait avant de partir, je suis désolée.

Elle tendit le sabre par la garde à Aryllë pour le lui rendre.

L'elven eut de la peine de voir Mellyna si triste. Elle avança vers elle, ne jeta pas un regard ou sabre et la serra dans ses bras. Son étreinte était tiède et réconfortante. Elle pouvait être un soutien amical, un vrai. Tout contre les cheveux blancs, elle dit :

- Elle avait peut-être une bonne raison. Il ne faut pas t'en faire, ça ne peut pas être contre toi. Sûrement est-elle partie trop vite et n'a-t-elle pas pu te prévenir. Il y a sûrement une bonne explication... ça va aller ... Ca va aller, tu verras.

Aryllë était passée du vouvoiement au tutoiement, émue par le trouble de la Gardienne.

- Et puis si tu veux tu peux venir avec nous. Tu lui rendras son sabre toi-même. Elle va préférer, elle te connait mieux. Vous êtes amies, c'est ce que tu m'as dit. Qu'est-ce que tu en dis, tu veux venir avec nous ?

Mellyna, de par son grand âge avait pris l'habitude de materner les "petite jeune" autour d'elle. Mais pour une fois, les rôles étaient inversées. Aryllë comme à une petite fille qu'elle aurait voulu rassurer. Et elle ne la lâchait pas.

-Tu...

Mellyna aurait voulu la repousser, elle aurait tant voulu être plus forte. Mais Aryllë était comme sa pierre, comme un petit soleil qui chassait les nuages du coeur. Elle ne dit rien et se laissa aller un moment. Elle avait vraiment accumulé trop de solitude pour se laisser toucher par tous ces inconnus.
Elle finit par baisser son bras qui tenait toujours le sabre horizontalement, ravala les larmes qui avaient failli couler et repoussa en douceur l'elven.

-Merci.

La gardienne semblait épuisée.

-Si Talisham est d'accord j'aimerais bien me joindre à vous.

Elle tourna ses grands yeux turquoise encore remplis de larmes vers l'homme pour guetter sa réponse.