Palais de Kirin le Volcan

- Ce serait dommage, oui...

Syld s'était glissé à l'intérieur.

La relève des gardes de la cour et de la porte n'avait pas encore eu lieu, mais elle ne devrait pas tarder. La nuit était tombée et la froide clarté des trois lunes réunies dans le ciel limpide enveloppait Fedoran comme un voile aux reflets changeants.

Le jeune homme semblait un peu plus pâle, et le bref regard qu'il coula du côté de Fa... de la fille dans le lit était étrangement fixe.

- Inutile de nous attarder ici.

Sans attendre d'avantage, il posa un genou sur l'appui de la fenêtre et sauta dehors.

S'il avait fait grand jour, on aurait pu distinguer des marques sur le mur juste à côté de la croisée, des marques qui ressemblaient fortement à celles qu'auraient laissé des griffes d'acier s'agrippant convulsivement à la pierre.

Négligeant d'attendre Soghann, l'assassin traversa la cour au pas de course. Le silence régnait, seulement troublé par le frais glouglou de la fontaine.
La porte avait été verrouillée derrière les visiteurs, et aucun passant ne s'était douté du drame qui se jouait entre ces murs impassibles.

Syld passa la muraille d'enceinte sans même faire une pause au sommet puis traversa la rue déserte. Le souffle court, il s'adossa contre une maison en vis-à-vis du palais du défunt Kirin.

- Mais merde !

Il serra les poings pour tenter de se calmer, sans même prendre garde aux griffes aiguisées qui lui rentraient dans les paumes.

Plume haussa les épaules à l'apparition/disparition de Syld et s'en revint au grand shalos. Enfin shalos... disons le grand type habillé d'une tente quoi.

- Bon mon petit Sogh...
Elle s'interrompit, une main sur la bouche et reprit avec un petit rire.
- Pardon. C'est vrai que nous ne nous connaissons pas. Donc, monsieur l'assassin... c'est mieux comme ça non? tu devrais te dépêcher de suivre ton ami. Si j'attends plus, je vais être accusée de complicité. Hors je tiens à dormir dans un vrai lit et non dans une cellule inconfortable.
S'asseyant sur le rebord du lit, elle s'étira langoureusement avant de se lever et de venir tout près de Soghann. Approchant sa bouche de son oreille, elle lui chuchota :
- Si vous repassez par Fedoran un de ces jours, venez faire un tour chez Mani. Ce sera gratuit pour vous et c'est moi qui régale...
Elle approcha ensuite ses lèvres du tissu masquant le visage de l'assassin mais s'arrêta.
- Si je continue, j'en connais une qui risque de m'en vouloir alors... File!

A grandes enjambées, elle alla à la porte du bureau, l'ouvrit et cria, avisant le garde :
- Au secours! Aidez moi! Le seigneur Kirin! Il est...
Elle se laissa tomber au sol, secouée de sanglots hystériques.
- C'est horrible! Affreux! Pitié, faites quelque chose!! Aaaaaaaaaaaah !!

Le garde, qui avait entendu du bruit dans la bibliothèque, avait déjà la main sur la porte quand la fille de joie illymis vint la prévenir du désastre. Son sang se glaça dans ses veines. Le seigneur Kirin! Délaissant la bibliothèque (et laissant du répit à lka voleuse du même coup) il cria à pleins poumons dans le couloir pour rameuter ses collègues. En attendant leur arrivée, il se précipita dans la chambre où gisait le cadavre. Ce n'était même pas la peine de vérifier. Vu la taille de l'ouverture de sa gorge et les litres d'hémoglobine autour, la vie de Seigneur Kirin l'avait bel et bien quitté.

Soghann était serain, la pression de l'attente retombant d'un coup. Fanaa se mit à lui parler, et l'assassin la dévisagea de façon étrange. Quelque chose clochait en effet, mais il n'était pas temps d'approfondir.
Sans attendre davantage, il sauta par la fenêtre de la chambre et suivi Syld à travers le jardin plongé dans l'obscurité. Il entendait des cris se répercuter à travers la bâtisse : l'alarme était donnée, il était l'heure de la fuite.

Il retrouva Syld de l'autre côté du mur, dans la rue. Il se plaqua contre la pierre, et, à peine essoufflé, fit :

- C'était pas de la tarte, cette fois... Mais on en discutera plus tard. Il faut sortir de la ville et vite.

Joignant le geste à la parole, l'assassin se détacha du mur et se mit à marcher vers les portes d'un pas rapide mais sans courir. Leur signalement n'avait pas pu être déjà révélé, inutile donc de trop attirer l'attention.

Il y eut bientôt une cavalcade dans les couloirs et six gardes arrivèrent en courant. Golbaf envoya l'un d'eaux alerter la police, tandis que les autres inspectaient la chambre et le bureau. Nul trace de personne par la fenêtre. Il n'y avait absolument aucun signe d'intrusion quelconque. Plume, toujours à terre, s'était légèrement déplacée pour éviter d'être piétinée. Waldorf, le garde du bureau finit par la remarquer et la fit asseoir sur une chaise avant de s'asseoir face à elle.

- Mademoiselle, avez vous vu quelqu'un entrer?
- Oui, je crois. je ne sais plus.
- Réfléchissez c'est important. Les coupables doivent être encore en ville, nous devons les rattraper et les punir!
- Je crois... Elle était seule.
- Elle?
- Oui. C'était une femme. Redoutable. Elle a été si vite, c'était horrible... j'ai été éclaboussée du sang de... oooooh
Elle plaça sa main devant sa bouche pour réprimer un haut le coeur, puis plia ses jambes et les entoura de ses bras en frissonnant.
- Son signalement?
- Toute petite et très menue. Très discrète aussi. Mais avec une opulente crinière rousse. De très beaux cheveux maintenant que j'y repense...
Waldorf leva les yeux au ciel. Ce n'est pas avec ça qu'ils avanceraient. Mais c'était deja mieux que rien.
- Les gars, regardez dans toutes les pièces au cas où elle se serait planquée!
Le garde interrogateur allait pour se lever lorsqu'il fixa Plume avec des yeux plus durs, méfiants, des yeux qui sondent.
- Une dernière question : auriez vous, vous-même quoi que ce soit à voir avec ce qui s'est passé?
Golbaf, derrière lui prit sa défense.
- Nan nan. Moi je l'ai vue et vu ce qu'elle portait, elle n'avait aucun endroit où cacher l'arme du crime. C'est pas elle.
- Bon. je demandais juste.
- Oui, c'est votre travail je comprends monsieur.
Plume frissonna encore et Golbaf rira sur un rideau, puis enveloppa les frêles épaules de l'étoffe détachée.
- Vous pouvez rentrer chez vous. Il se peut que l'on vous interroge demain mais pour cette nuit, vous avez eu assez de chocs je pense.

Plume ouvrit de grands yeux incrédules.

- Vous allez me laisser rentrer seule?
- Nous somme sur une affaire sérieuse, là. Et que peut il vous arriver de pire? Les gardes rouges patrouillent dans le coin vous serez tranquille.

Déçue mais résignée, Plume retourna dans la chambre récupérer ses vêtements et son encensoir. Elle se rhabilla et utilisa le rideau comme une cape. En passant devant la bibliothèque, elle crut apercevoir un mouvement du coin de l'oeil. Un objet précieux qui se déplaçait dans les airs et s'immobilisa aussitôt. plume sourit. peut être les gardes ne seraient ils pas totalement bredouilles au final.

Elle alla récupérer son voile dans la grande salle où ne se déroulerait pas la grande fête, traversa la cour et passa la porte. Elle croisa une escouade de casques rouges qu'elle salua, les larmes aux yeux, encore sous le choc, puis continua d'avancer un titubant légèrement parfois. La naÿs ne faisait plus effet, Fanaa pouvait se réveiller à n'importe quel moment, elle devait se dépêcher. Elle allongea le pas.

Adwel s'assis sur le bord du bassin de baignade. Elle soupira et fit couler lentement de l'eau bien chaude. Une condensation commençait à se former.

* comme cela, si quelqu'un vient, il pourra toujours me chercher...*

Elle se laissa glisser dans le fond de la pièce cherchant une idée pour sortir... elle n'allait pas rester éternellement ici.

A peine installée dans un coin, la porte s'ouvrit en grand

- J'te jure, j'ai entendu du bruit!
- Mais non, ya personne...
- Mais le robinet, il s'est ouvert tout seul?
- hey, t'as vu les barreaux? c'est p't-être un truc de ces mago qui peuvent demander a l'eau de se couler a minuit s'ils veulent.
- Mouais, ça me rassure pas tout ça... Et puis si on tombe sur ses folle de rousse... elle l'a égorgé comme un cochon! Parait même que la Fille de ma maison Mani était encore empalée a lui quand...
- Chochote... aller, on sort.

Ils refermèrent la porte en laissant couler l'eau... Adwel digéra le peu d'information qu'elle avait eu... Une rousse? la fille de joie devait connaitre les deux Shalos... car ils n'avaient pas le pouvoir de métamorphose... La maison Mani... Elle haussa des épaules.

Perdue dans ses pensées, elle n'avait pas fait attention que l'eau débordait... Cela lui donna une idée... Elle attrapa une pate de lavage qui était sur un meuble ainsi que plusieurs tissus. Elle en fit une boule qu'elle utilisa pour boucher le robinet qu'elle venait de fermer. La médiovienne ouvrit de nouveau les vannes de la baignoire. Le métal commençait a grincer... Les tuyaux allaient éclater... et l'eau se déverser dans la maison... très bon pour elle...

Un claquement, et voila qu'un geyser apparru dans le mur nourrissant le flot de l'eau qui se déverssait sur le sol. Adwel sourit. Une dizaine de centimetre montait encore. Puis adwel ouvrit la porte. Totalement indétectable grace a l'élément liquide, Adwel suivi l'eau dans les couloirs. Elle s'avança, esquiva de justesse un garde qui sortait en jurant. Dans un slalom improvisé, la jeune voleuse réussi a déscendre l'escalier rendu glissant.

Le chemin d'eau ne fut bientot plus que très peu alimenté. Il ne restait que peu de metres jusqu'a la sortie... mais trop pour lui permettre d'utiliser l'Art entièrement. Elle esquiva un membre des casques rouges... Puis un autre... Ils ramenaient... des balais? La voleuse n'avait plus le temps. Elle tiendrait l'Art le plus possible... la fontaine était son prochain objectif. Elle se mis a courir.

Les gardes balayeurs se gratèrent la tête. Ils entendaient des bruits de pas juste devant eux... mais pas l'ombre d'un moo.

Adwel tentait de garder l'Art le plus longtemps possible. Elle déboucha dans la cours et se figea... Un contingent complet de casque rouge... Elle sauta sur la droite derrière la végétation. Elle sorti sa gourde et ne marcha que pas a pas vers la porte, veillant a ne faire aucun bruit. Une patrouille passa le portail après avoir reçu leurs ordres. Une autre les suivit quelques minutes après...

Adwel s'arrêta net. Un soldat passa derrière les fourets en sifflant. Il se tenait face au mur, a quelques centimetre de la voleuse. Il dégraffa son pentalon, sorti son "arme"... et se soulagea, un sourire béat aux lèvres... Adwel réprima un mouvement de recule et eu une expression de dégout dans son invisibilité. Son office terminée, l'homme retourna voir ses camarades.

La voleuse continua son chemin. Elle était maintenant a quelques metres de la porte.

- Teguert!
- Oui mon Lieutenant
- Ferme les grilles, pas besoin d'attirer les passents.
- Oui mon Lieutenant!

*noooooon... le sort s'acharne... *

Adwel vit, impuissante, la grille se fermer grace aux bons soins de Teguert...

Adwel était toujours dans une impasse. Des casques rouges partout, des patrouilles, des passants... elle ne savait comment se sortir de la. Elle se mis dans un coin de la propriété et se prostra dans l'ombre "a en devenir Shalos" comme disait l'adage...

Ah... ces Shalos... quelle idée elle avait eu de les suivre.... Mais d'une certaine façon, c'était bénéfique, elle avait retrouvé un joyau Médiovien. Elle devrait le faire expertiser pour confirmer ou non ses craintes... la jeune voleuse soupira en silence.

La nuit avançait doucement. Les patrouilles s'étaient peu a peu disperssées dans la ville. Seules deux groupes étaient chargés de garder le batiment.

Perdue dans ses songes, elle n'avait pas entendu arriver un des casques rouges qui la menaça immédiatement

-He toi! qu'est ce que tu fabrique la? Les Gars! j'ai trouvé quelqu'un!

Adwel sursauta et chercha rapidement comment se sortir de cette situation encore empirée. Elle fit une mine effrayée et tramblait de tout son corps comme quelqu'un sous le choc.

- Je.... Elle...
-Tais toi et lève toi!

La médiovienne s'exécuta lentement, toujours simulant une détresse intense.. Elle se mis a pleurer et se jetta dans les bras du garde

- Elle l'a tué! Elle l'a tué...

L'homme ne su alors comment réagir. Son supérieur, qui sortait en courant, fit une moue déçue en découvrant Adwel. Il pensait sans doute trouver "la meurtrière". Il posa une main douce et fit en sorte de calmer sa voix.

- Mademoiselle?
- ...
- Mademoiselle... que faites vous la?
- Elle l'a tué... et elle est partie... elle m'a pas vu... et elle est partie.
- Qui l'a tué?
- La Rousse... la sanguinaire... elle l'a eu... et elle est partie.
- Où? par Où?
- Vers les portes... par la...

Alors qu'Adwel repartait de plus bel en sanglot, le lieutenant fit un signe et une des patrouilles sorti de la propriété.

- Où logez vous?
- je...je devais partir... je devais... l'auberge.
- Emenez la au Mitz. Dites que c'est de ma part.
- Bien Mon Lieutenant.

Toujours prostrée, la jeune femme se fit accompagnée au Mitz, une hostelerie de très bonne qualité... meillieure en tout cas que celles des auberges habituelles.

Le militaire et Adwel y parvinrent quelques dizaines de minutes. L'admission se fit sans encombres et la Mediovienne fut alors accompagnée a sa chambre. Elle ne prit pas le temps de la détailler et s'écroula dans son lit. Trop d'émotions... et une nuit trop longue. Elle eu a peine le temps de se dire qu'elle avait eu de la chance qu'ils croient a sa détresse qu'elle sombra dans un sommeil sans rêve.