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 Palais des Artistes

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Fanaa
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MessageSujet: Re: Palais des Artistes   Palais des Artistes Icon_minitimeJeu 10 Juin 2010 - 1:54

Après sa douche, Gavriel s'écroula comme une masse dans son canapé. Mais qu'y avait il dans la tisane de Kyara ? Des rêves bien agréables, pour sûr !





La ville de Medievir comptait deux bâtiments spécialement importants et imposants : le château de la Reine Leryanna et le Palais des Artistes. Ce dernier bâtiment était immense, il abritait la plus prestigieuse école d’arts de Medievir. De nombreuses disciplines y étaient représentées, du théâtre à la peinture en passant par la musique et la danse. Le Palais des Artistes était connu pour former les meilleurs, les plus talentueux, les plus impressionnants. L’édifice comprenait les différentes salles d’enseignement, les dortoirs des élèves, les appartements de fonction de personnes particulières et bien entendu, plusieurs scènes de spectacle, ouvertes au public.

C’était à cet endroit que la maman de Fanaa avait vécu la plus importante période de sa vie. A cette époque, Fealisèn s’était fait appeler Aquarelle … Elle avait étudié la danse dans cette école, avait tout donné d’elle-même pour réussir et à force d’intense fatigue, de travail acharné, de ténacité, de courage, de souffrance, elle avait fini par atteindre la plus haute fonction qu’il pouvait être donné à une danseuse. Elle était devenue la Première Danseuse Sacrée de Medievir.

Elle était parvenue au sommet … puis en avait dégringolé. Il avait suffit d’un hasard, un accident … et elle avait tout perdu. Tout.



Et elle n’avait même pas pu quitter ce monde en paix. Elle n’était ni un fantôme, ni vraiment un ange, mais elle était là, errant parmi les vivants et aperçue par de trop rares personnes. Si Fealisèn restait coincée ici-bas, c’est qu’elle se trouvait enchaînée. Enchaînée à une promesse qu’elle n’avait pas pu tenir de son vivant. Une personne l’attendait. Une personne qu’elle devait rejoindre à tout prix, sauf que c’était loin d’être simple. Pour se déplacer sur de longues distances, elle devait s’accrocher à quelqu’un. Bien entendu, ce ne pouvait être n’importe qui. Il lui semblait parfois qu’elle ne passerait jamais de l'Autre Côté …



Le dénommé Earl l’avait vue et même compris son dialecte. Elle aurait pu s’accrocher à lui et se laisser mener au bon endroit. Elle avait escompté le faire mais elle l’avait perdu. De plus, les pouvoirs de Fealisèn étaient fluctuants. Parfois elle pouvait se montrer, se faire entendre, voire même plus ou moins toucher des personnes. D’autres fois elle n’était pas plus qu’une volute de brume mordorée.

Ici, à Medievir, cité d’où elle avait été bannie de son vivant et Oubliée, elle avait du mal à se déplacer. La sanction des Oubliés était si lourde … qu’elle semblait agir même après la mort.



Alors cette nuit, lorsqu’elle avait ressenti une détresse, écho de celle qu’elle avait elle-même ressenti certaines nuits pendant lesquelles la mélancolie de son passé venait la tourmenter, elle avait su quoi faire. Fanaa. Elle pouvait utiliser Fanaa, sa fille à l’esprit tellement vide en ce moment. Sans son âme, Fanaa n’était plus qu’un réceptacle, un joli réceptacle.

Fealisén secoua la tête.


*Une marionnette. Tu es devenue une marionnette, rien de moins. Je pensais t’avoir dotée de ce qu’il te fallait pour vivre seule et ne dépendre de personne pourtant. Mais je vois que j’ai échoué. Secoue toi, Sheyelendra, secoue toi je t’en prie ! Eveille toi ! Tu leur laisses à tous le contrôle. Je ne t’ai pas élevée pour cela…*



La silhouette en chemise de nuit vaporeuse, qui traversait pieds nus les jardins tel un fantôme s’arrêta et mit sa main devant sa bouche. Elle se sentait vaguement nauséeuse.



Fealisèn était atterrée, se pouvait il que cet être si faible, si insignifiant soit son enfant ? Celle qui avait la Source en elle ? La Chandlune à la plus grande force brute ? Impossible. Et pourtant … Sheyelendra, celle qui devait échapper à son destin avait non seulement été rattrapée par celui-ci mais en plus complètement écrasée par lui. Hélas. Pauvre petite poupée. La Danseuse Sacrée avait pitié de son enfant mais que pouvait elle faire dans son état ? Rien.




*Viens avec moi, petite marionnette, je vais te montrer quelque chose de joli.*



C’est ainsi que Fanaa se laissa guider par ce qui lui semblait être une intuition et arriva devant le Palais des Artistes. Fealisèn se sentait toute chose de se trouver à cet endroit tant d’années après. Si son cœur avait encore battu, il aurait fait des bonds dans sa poitrine. Elle fit faire le tour de l’édifice à Fanaa jusqu’à un passage qui menait au jardin. C’était par là que les étudiants rentraient quand ils décidaient d’aller faire la fête dehors. Ce genre d’activité était prohibée, pourtant on n’avait jamais installé de gardes pour empêcher quiconque de sortir. Les élèves était jugés sur leurs résultats. Si leur niveau baissait parce qu’ils préféraient s’amuser, soit ils le comprenaient et redevenaient sérieux, soit ils étaient renvoyés. Tout simplement.



Fealisèn guida donc Fanaa parmi les nombreux couloirs, plus émue qu’elle ne l’aurait cru. Fanaa avait l’impression que le contact du sol, les murs, les odeurs ne lui étaient pas inconnus. Et elle trouvait cela très agréable. Envolé le malaise provoqué par Gavriel, elle découvrait cette nuit un endroit des plus fantastiques. Ce n’était pas le lac, mais c’était tout de même drôlement joli.

Dans l’enceinte du Palais, l’endroit qui avait été sa maison, Fealisèn était protégée de son bannissement. Elle se sentait revivre, c’était sa maison, et elle l’accueillait, Fealisèn le sentait, le savait ! Elle sentait son cœur se gonfler d’un sentiment qu’elle n’avait plus éprouvé depuis bien longtemps : le bonheur. Au fur et à mesure des couloirs, elle prenait de plus en plus consistance et put finalement se détacher de Fanaa pour marcher à ses côtés. La poupée l’aperçut puis lui sourit. Elle ne la reconnaissait pas. Mais qu’à cela ne tienne, Fealisèn se sentait trop bien pour se peiner d’un tel détail ! La Danseuse Sacrée saisit la main de Fanaa et se mit à courir plus vite. Le contact irréel transmit une indicible joie à Fanaa, qui s’émerveillait de toujours reconnaître les lattes à éviter pour ne pas faire grincer le plancher.



Les joues roses, la poupée et l’apparition s’arrêtèrent devant une porte moyenne, les mots « la musique charme l’âme » gravés dans son bois. Fealisèn se tourna vers Fanaa. Cette dernière ne voyait en l’apparition qu’un éclat de songe, un peu comme Jess et Reyes. Sauf que Jess parlait normalement tandis que les mots de la silhouette floue avaient de drôles d'intonations, étrangement chantantes, et que Fanaa ne comprenait pas ses paroles, seulment les sensations qu'elle lui faisait partager. Elle se croyait vraiment en train de rêver.



*Viens petite marionnette, je vais te montrer mon trésor…*



Fanaa poussa la porte…


Dernière édition par Fanaa le Ven 11 Juin 2010 - 14:23, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Palais des Artistes   Palais des Artistes Icon_minitimeJeu 10 Juin 2010 - 17:59

Derrière la porte se trouvait une salle de musique. Pas la plus belle, ni la plus grande, mais la préférée de Fealisèn, car la plus calme. Il lui semblait que c’était là une pièce de « retraite » pour les instruments fatigués, usés, mais dont on ne se débarrassait pas. A Medievir en général et au Palais des Artistes en particulier, on respectait trop les instruments de musique pour se permettre de les détruire. On préférait les entreposer à différents endroits selon leur état. Dans les sous sols par exemple –secs et propres- se trouvaient les instruments qui n’avaient plus aucun espoir d’être joués.
Dans la pièce de Fealisèn se trouvaient ceux qui étaient assez vieux pour avoir une âme mais trop pour rester bien accordés longtemps.

Profondément émue, Fealisèn joignit ses mains et sourit.

*Je suis revenue !* annonça-t-elle.

L’atmosphère jusque là silencieuse et immobile sembla d’un seul coup se charger de quelque chose de très doux, la pénombre parut s’éclaircir un peu. Les instruments reconnaissaient Fealisèn et l’accueillaient, comme on accueille le retour de la fille ou de la petite fille prodigue.

Fanaa sourit, s’avança timidement et caressa un violon couleur miel. Fealisèn posa sa main éthérée sur celle de Fanaa et la poupée ressentit alors une étrange sensation. Sous leur mains mêlées, il lui semblait sentir le bois de l’instrument pulser de façon infime. Même, elle crut sentir un très légère tiédeur. Le violon était vivant !
Fealisèn ouvrit le bras et désigna l’ensemble des habitants de la salle.


*Ils le sont tous, petite marionnette !*


Fealisèn guida la main de sa fille sur un violoncelle, un piano, une harpe et tous répondirent à son contact, pour sa plus grande joie. De son vivant, la Danseuse Sacrée avait toujours eu une affinité spéciale avec le bois, et cette particularité l’avait grandement aidée. Mêlant cette sensibilité à son pouvoir de Chandlune, elle avait pu s’ouvrir et comprendre ce que le bois lui murmurait. Pour son plus grand bonheur. C’est ainsi que les nuits où elle était sur le point de craquer, elle venait ici et les laissait jouer d’elle autant qu’elle jouait d’eux. Elle n’avait qu’à s’asseoir et les effleurer pour s’ouvrir à eux, puis à se laisser guider. C’était magique … et tellement apaisant…

Mais depuis son jugement et plus tard sa mort, elle n’était jamais revenue. Pourtant aujourd’hui, ils la reconnaissaient !

Fealisèn voulait jouer, elle voulait toucher les cordes, les tables, les caisses de résonance, les âmes …

*S’il vous plait, chantez pour moi …*

Et ils répondirent à son appel. Tandis que sa silhouette fantomatique effleurait les cordes de la grande harpe à la peinture dorée écaillée, les notes se mirent à résonner. Le son était étrange, issu non vraiment de l’instrument physique, mais de son esprit. Fanaa, émerveillée, observait les cordes qui restaient immobiles mais qui pourtant vibraient très légèrement à chaque passage des doigts de la femme floue. La mélodie était irréelle, trop claire, trop légère, trop aérienne pour vraiment provenir d’un véritable instrument. Et pourtant … l’esprit de Falisèn jouait de l’esprit de grande harpe et en entendant la musique ainsi produite, la poupée se dit que c’était sûrement cela la musique des anges.

Tandis que Fealisèn appelait les autres esprits des instruments à se faire entendre, Fanaa se mit à danser. Fealisèn l’observa et reconnut les yeux, la tenue, le port de bras, le port de tête, la grâce, la souplesse qu’elle avait elle-même acquise avant de les transmettre à son enfant. Son enfant qui dansait maintenant, presque aussi bien qu’elle.
Et à la joie chaleureuse de la Danseuse Sacrée à retrouver « sa » pièce se mêla le froid d’un regret, d’une culpabilité à l’égard de Fanaa.


*J’aurais dû être plus maternelle avec toi. J’aurais dû te donner plus de tendresse et moins de leçons de vie. Peut-être que si je l’avais fait, aujourd’hui tu ne serais pas aussi … incomplète… Je suis désolée, je suis sincèrement désolée petit papillon. Je te demande pardon.*

Fanaa se disait qu’elle vivait là un bien joli rêve. Dommage que Jess et Reyes ne soit pas là. Et aussi qu’elle ne comprenne pas les mots de la femme floue. Et qu’elle soit, par là même, incapable de lui répondre.

La Danseuse Sacrée arrêta de jouer et lui sourit.


*Aujourd’hui, j’ai l’occasion de partager des choses avec toi, profitons en ! Viens, je vais te montrer d’autres endroits !*

Alors que la musique éthérée se laissait encore entendre dans leurs têtes, la femme et la jeune fille repartirent dans les couloirs. Fealisèn lui montra une salle de danse avec ses murs tapissés de miroirs, sa barre de bois, son plancher aux craquements rassurants, et elle la mena à une salle d’armoires, de caisses et de penderies pleines de costumes. Fanaa –qui était bien une fille- s’extasia dessus durant un certain temps. Elle riait en attrapant un tutu pour le lâcher pour un autre, puis un costume de danse de style plus levitis tout en voiles, des robes de danses de salon, des paillettes, des froufrous, des volants, des brillants, et des couleurs, tant de couleurs !

Fanaa pirouetta dans le pièce, parée de tel ou tel costume de scène. Elle se laissait porter par la musique dans sa tête et son corps faisait le reste. C'était comme lorsque Kyara la faisait danser avec son violon mais en mieux car là elle était libre. Au fur à mesure, ses mouvements se faisaient plus recherchés, de niveau plus élevés. Si son esprit avait chassé ses souvenirs de leçons de danse, ses muscles, eux se rappelaient de tout.

Fealisèn observa se mettre en équilibre sur les mains, les bras légèrement pliés, une jambe tendue en arrière et l'autre repliée dans le même sens et se rappela que, si elle-même pratiquait la danse pure et dure, sa fille était plutôt tournée gymnastique rythmique et acrobatie.

La fatigue commença à se faire sentir et Fanaa tira à elle un tissu rouge, se roula en boule à même le sol et se prépara à s'endormir.


*Non petite marionnette, pas ici! Il faut que tu rentres, c'est mieux.*

La poupée fit la moue mais se releva de bonne grâce en se frottant les yeux. La femme floue la raccompagna jusqu'à la porte arrière et lui adressa quelques derniers mots.

*Je sais que je n'ai pas toujours été une mère exemplaire. Encore maintenant je continue de souhaiter que tu donnes le meilleur de toi-même. C'est une habitude que j'ai prise avant et j'ai du mal à m'en défaire. Encore une fois je te demande pardon. Et ... merci pour ce soir. Merci de m'avoir menée "chez moi". Ce serait bien que tu en gardes quelques souvenirs. Enfin ... fais attention à toi. Vraiment. Bonne nuit petite marionnette.*

Un peu fatiguée mais d'excellente humeur, Fanaa rejoignit le cottage par le même chemin qu'à l'allée c'est à dire discrètement dans les jardins. Discrètement mais en tournoyant sur elle-même. Maintenant qu'il retrouvait la danse, son corps voulait bouger encore !


Dernière édition par Fanaa le Lun 26 Juil 2010 - 17:19, édité 1 fois
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